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  • Les embûches de la société de l’hyperconnexion

  • Les Pathologies des écrans

    « Aujourd’hui c’est un drame national: la troisième cause d’accident de la route est regroupée dans ce que l’on appelle le trouble de la vigilance. Lâcher la route des yeux pour lire un mail ou un SMS en fait évidemment partie », révèle Éric Lemaire, président d’Axa Prévention. Les chiffres du gouvernement le confirment : téléphoner au volant multiplie par trois le risque d’accident, et rédiger un SMS en conduisant multiplie ce risque… par plus de 20 !

    Des conclusions sans appel qui témoignent de l’importance prise par les écrans dans notre société et de l’addiction qui en résulte. Si l’on se penche sur les estimations des usagers eux-mêmes, les conclusions invitent à réfléchir. En effet, selon une étude Elabe publiée en octobre 2019, 60 % des interrogés se déclarent incapables de passer une journée sans téléphone. 11% des Français affirment qu’ils ne supporteraient pas l’absence de leur mobile plus d’une heure et 37% avouent que s’en passer plus d’une demi-journée n’est pas envisageable. La sensation de manque se fait très vite sentir…

     

    L’injonction d’un dialogue instantané

    Cette même enquête révèle que seul un tiers des Français sont conscients de leur dépendance. Une addiction présente dès le réveil puisque plus de 60% des interrogés se ruent sur leurs écrans au saut du lit, un réflexe quotidien chez 70% des jeunes. Plus de la moitié des sondés consultent leur smartphone en moyenne toutes les 10 minutes, pour être sûr de ne pas passer à côté d’un message. Cet automatisme est présent chez 76% des 15-17 ans et 73% des 18-24 ans. La course à l’instantanéité des échanges est désormais de mise, 55% des répondants affirmant répondre à un message dans les 30 minutes suivant sa réception! Aujourd’hui, le dialogue se fait dans l’instant. Une réalité qui n’est pas sans incidence sur la capacité de concentration des plus jeunes qui ont pris l’habitude d’être multi-écrans. 81 % des jeunes affirment consulter un mobile ou une tablette alors qu’ils sont déjà en train de regarder un film.

     

    Les Français plus « accros » qu’ils ne l’avouent…

    Selon l’étude Médiamétrie (année TV 2018), le temps passé par jour devant les seuls programmes télévisés est de 3 heures 36 minutes, tous écrans et tous lieux confondus. Un chiffre à mettre en corrélation avec l’estimation de consommation d’écrans : les Français pensent être face à leurs écrans un peu plus de quatre heures par jour, temps professionnel inclus. Si une majorité jugent entretenir une relation saine et contrôlée avec les divers écrans, de nombreux éléments contredisent ce sentiment de contrôle. Les applications permettant de mesurer le temps passé devant écran révèlent que les Français sont bien plus gros consommateurs qu’ils ne le prétendent. Car l’écran s’est invité dans nos vies, au point de déjeuner avec nous. En effet, 38% des interrogés admettent consulter leur smartphone lors des repas de famille. Une utilisation qui n’est pas sans conséquence au regard des chiffres des conducteurs téléphonant au volant ou des jeunes lisant leurs portables en traversant la route… Ces résultats interrogeant notre capacité à identifier correctement là où débute une connexion excessive pour notre santé et notre relation aux autres.

    Près de 75% des interrogés estiment que le réflexe matinal de consultation d’un écran et l’utilisation simultanée de plusieurs écrans devant la télévision ne présentent aucun risque. Même conclusions pour le binge watching, ou l’art de rester des heures durant devant la télévision en visionnant à la suite les épisodes d’une même série, phénomène générant isolement, dépendance et extrême fatigue… Même s’ils sont au fait des risques de la surconsommation d’é­crans, certains ne peuvent s’en empêcher. Et c’est là où apparaissent des contradictions. Car si 77% des parents déclarent faire attention à leurs comportements en présence de leurs enfants, 20% d’entre eux consultent un écran en déjeunant. Enfin, l’écran-doudou reste quoi qu’il en soit une réalité : 14% des parents admettent en effet qu’il leur arrive de faire patienter ou de calmer un enfant en le plaçant devant un écran, et 8% l’utilisent pour faire manger leurs enfants ou les aider à s’endormir. Enfin, les écrans peuvent être source de gêne sociale : près d’un tiers des répondants se sont déjà vu reprocher leur surconsommation d’écran, la proportion étant encore plus importante chez les jeunes (66% des 15-17 ans). Quant aux tranches d’âge plus élevées, elles ne sont pas en reste puisqu’un quart des 35-64 ans sont également concernés. Des conclusions qui révèlent certes une surconsommation d’écrans dès le plus jeune âge mais qui ne semble pas, pour l’instant, poser un problème aux intéressés. Reste que pour l’heure, peu d’outils existent pour évaluer les risques réels.

    Frédérique Guénot

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