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  • L’irrésistible ascension de l’Hospitalisation à domicile

  • Les structures d’hospitalisation à domicile sont nées dès les années 1940 aux États-Unis où les pouvoirs publics ont très vite compris tout le parti que l’on pouvait tirer de ces home health care, pour peu que l’on sache les doter d’un cadre juridique propre à en permettre le développement. De profondes mutations des  modalités de financement ont  produit des effets structurels dès les années 70, pour aboutir à une offre qui se chiffre autour de 8 000 agences, avec une dépense évaluée à 25 fois celle de la France, contre 8 fois pour la dépense hospitalière. 

    Expérimentée pour la première fois à l’hôpital Tenon en 1951, la HAD apparaît véritablement en France en 1957-1958 avec la création de la HAD de l’APHP, puis de Santé-services à Puteaux. Si elle constitue aujourd’hui une forme d’hospitalisation à part entière, la structuration et le développement de la HAD dans le paysage sanitaire français a été plutôt lent. L’essor de la HAD a été, au départ, freiné par la planification sanitaire. Bien qu’une convention ait été signée en 1961 entre la HAD et l’assurance maladie, il faudra attendre la loi hospitalière du 31 décembre 1970 pour que cette forme d’hospitalisation soit officiellement reconnue. S’ouvre alors une phase de structuration médicale et administrative, autour de cette loi et de la circulaire de la CNAMTS de 1974 qui précise notamment les critères médicaux et sociaux d’admission de patients ainsi que les conditions de prise en charge. Ce cadre a favorisé l’essor de la HAD, malgré une relative stagnation dans les années 80 liée à de multiples facteurs —réticences des prescripteurs hospitaliers, prudence accrue de l’assurance maladie et des autorités de tutelle, etc. 
    Une nouvelle phase s’ouvre avec la loi de 1991 et ses décrets d’application qui reconnaissent la HAD comme une alternative à part entière à l’hospitalisation complète et en fixent les règles constitutives: médecin coordonnateur, cadre infirmier, permanence des soins et continuité de la prise en charge, etc.  Mais c’est dans les années 2000 que la HAD se développe véritablement, sous l’impulsion d’une politique volontariste des pouvoirs publics. L’ordonnance du 4 septembre 2003, en permettant la simplification de l’organisation et du fonctionnement du système de santé émancipe la HAD des contraintes de la carte sanitaire par l’abolition du « taux de change » qui limitait la création de places de HAD en la liant à la suppression de lits d’hospitalisation complète. La circulaire du 4 février 2004 précise les modalités de prise en charge générale. Celle du 1er décembre 2006 rappelle le caractère polyvalent et généraliste de la HAD, son régime d’autorisation, ses obligations —sécurisation pharmaceutique, soins palliatifs, continuité des soins—, le rôle des différents acteurs internes et externes et son positionnement au sein de l’offre de soins locale. Enfin, la loi HPST contient plusieurs dispositions concernant la HAD, qui visent notamment à :
    • garantir la protection de l’appellation « hospitalisation à domicile » contre des abus éventuels ;
    • reconnaître la HAD comme un mode d’hospitalisation à part entière et non plus comme une simple alternative à l’hospitalisation traditionnelle ;
    • assouplir le circuit du médicament en HAD ;
    • faciliter la participation des professionnels paramédicaux, notamment en offrant la possibilité de déroger au paiement à l’acte pour leur rémunération.
    En  2005 le dispositif de tarification de la HAD est profondément rénové, avec la mise en place d’un système de financement à l’activité (T2A), un tarif qui, adapté à la production de chaque structure, définit les recettes dont elle va disposer pour couvrir ses charges. Ce dispositif a permis un fort développement de la HAD même si l’évolution des tarifs a été fortement contrainte depuis 2005. Il a assuré un bon équilibre économique aux structures.
    L’Assurance maladie a su accompagner le développement de la HAD. Dans le cadre d’un plan national lancé en 2008 elle a mis en œuvre une action visant à favoriser l’amélioration des pratiques en matière de respect des principes de la HAD, des règles de codage et de facturation. De son côté la Haute Autorité de santé (HAS) a engagé une adaptation des référentiels aux spécificités de la HAD, afin de garantir une meilleure efficacité de la démarche de certification. Chaque année, à partir de 2011, les structures d’hospitalisation à domicile (HAD) devront transmettre à la HAS un ensemble de données qui lui permettront de calculer les indicateurs et de suivre leur évolution dans le temps. Toutes les HAD devront être certifiées dans le cadre d’un nouveau référentiel d’ici 3 ans.
     
    Le « libre choix du domicile » est inscrit dans le Plan solidarité Grand-âge
    La place de la HAD est soulignée dans le Plan solidarité Grand-âge de juin 2006 qui organise une politique de la longévité et de prise en charge de la dépendance autour de cinq axes, dont l’un d’entre eux dénommé
    « libre choix du domicile », a pour objectif central de permettre aux personnes âgées de rester à domicile avec trois ensembles de mesure :
    • doubler les capacités d’hospitalisation à domicile d’ici 2010 (passage de 8 500 à 15 000) ;
    • développer le nombre de places de services de soins infirmiers à domicile (augmentation de 40% en cinq ans : passage de 87 000 à 117 000, en adaptant le système de tarification) ;
    • assurer une présence médicale sur le territoire à travers la formation des médecins et l’augmentation de 20% de la rémunération des médecins installés.
    L’ensemble de ces dispositions a conduit à un essor considérable de la HAD au cours des années 2000, avec une accélération depuis 2005. Le nombre d’établissements autorisés passe ainsi d’une soixantaine à la fin des années 90 à 298 en 2009, soit deux fois plus qu’en 2005. Sur la même période, l’activité a augmenté de 119% pour atteindre 3.3 millions de journées en 2009 (9 029 places occupées) et 129 748 séjours complets. Cette augmentation s’est poursuivie durant l’année 2010. Malgré cette progression, la HAD ne représente qu’une part minime de l’activité hospitalière : 0.45% des séjours d’hospitalisation complète et partielle en 2008.
    Bernard Maruani
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