• Numéro TLM 73
  • La Médecine Anti-âge

Spécialité : Médecine générale

Date : 15/10/2008

La Médecine Anti-âge
L’ anti-âge, faut-il être contre ? S’il est vain de penser gagner le combat contre le temps qui passe, il paraît également futile et dérisoire de s’exprimer en termes guerriers pour traiter d’un tel sujet ! Qui peut imaginer, même en tenant compte des progrès considérables de la médecine, de la vie sociale, de la science et de notre économie, que la mort, ultime combat (c’est le sens même du mot agonie) pourrait un jour être vaincue ? Mais on peut et on doit résister. C’est peut-être là la clé du malentendu sémantique qu’induit la notion d’ « antiâge». Venu de l’Ouest (USA), de la classe montante (déferlante ?) des baby-boomers, de cette génération qui aspire à continuer à vivre « longtemps et bien », ce mouvement de résistance s’amplifie et s’organise, et il paraît difficile de ne pas se sentir concerné. N’est-on pas là face à une sorte d’aboutissement de cet « individualisme», de ce « chacun pour soi » qui submerge chaque moment de notre vie quotidienne ? Et, même si on le déplore, quels moyens pour y échapper ? Lutter contre la notion d’ « anti-âge » n’est sans doute pas d’actualité. Mais accompagner le mouvement, c’est préférer la vitalité —en exploitant la moindre parcelle de vie— à la longévité… Cette fois, vieillir reprend du sens et nous montre une direction : non pas se battre contre un « ennemi » forcément vainqueur, mais résister par tous les moyens et avec une énergie sans faille à ce temps qui passe et que l’on a pu qualifier, par ses conséquences dramatiques, de naufrage. « Vieillir, c’est être moins », a pu dire également le philosophe Michel Onfray, phrase définitive et réaliste ; mais est-ce précisément cette forme de réalisme qui permet de construire un avenir plus serein ? Faut-il se rendre, baisser les bras et finalement se laisser glisser vers l’inéluctable ? La Philosophie (C. Draperie) et la Psychanalyse (Dr P. Lurcel) nous rappellent ici les grandes lignes d’une sagesse millénaire et les réflexions clairvoyantes qui permettent à l’humanité d’avancer malgré les dangers de chaque instant. Remise en place aussi des concepts et du sens à donner à ces jours qui passent, à cette usure que le temps nous apporte : le Dr J. Lurcel, médecin généraliste et gérontologue, à l’écoute quotidienne de ses patients, trouve les mots qui aident, ceux qui encouragent sur le chemin du réel, du vrai, sans illusion, sans fioriture mais aussi avec conscience… ; la mort est la fin de la vie ; le néant d’où nous venons va nous reprendre, à quoi bon le nier ? Et puis, résistance encore, mais cette fois organisée à plus grande échelle que celle de l’individu : l’action menée par le Dr F. Sarkozy mêle la médiatisation (une chaîne TV) aux concepts et à la recherche d’un sens, en aidant à lutter non plus en utilisant le mot « anti » dans sa seule version combative, mais en donnant une dimension positive à ce combat : un peu comme Sisyphe roulant indéfiniment son rocher avant de le voir à nouveau tomber, la nature humaine retrouve sa dignité dans cette résistance au temps qui passe. Utilisons les moyens les plus simples —physiques, économiques, psychologiques— qui sont à notre portée, mais utilisons-les à fond, sans jamais baisser les bras, et en considérant toujours que, même si au bout du compte l’« auberge » nous attend, le chemin à parcourir reste le plus beau ; rien n’est trop fort pour nous permettre de l’emprunter avec bonheur et dignité : utiliser l’apparence est ici un devoir… Et qui dit que le paraître n’engendre pas l’être ? Non pas rester dans une éternelle jeunesse, mais accepter de vieillir le plus lentement et dans les meilleures conditions possibles… Le journal TLM, une fois de plus, ouvre donc ses pages à un débat d’idées, dans lequel on pourra percevoir des contradictions, mais qui a le mérite et le courage de mettre en avant un sujet qui fait sourire certains, mais n’en est pas moins essentiel car il concerne chacun d’entre nous, dans son rapport au temps qui passe. Non pas être « antiâge», mais prêt à lutter, non pas avoir le désir et l’infinie prétention de vaincre, mais savoir accompagner et surtout résister, en utilisant tous les moyens qui s’offrent à nous ! C’est sûrement la tâche des générations à venir que d’approfondir ces concepts, mais c’est aussi la nôtre que de préparer la voie… On comprend mieux alors le sens de cette belle résolution: « Nous vaincrons car nous sommes les plus faibles »…

  • Ce dossier est composé de 3 Articles