• Numéro TLM 118
  • Comment organiser la souveraineté numérique

Spécialité : Gestion professionnelle

Date : 09/02/2020

Comment organiser la souveraineté numérique

« La digitalisation du parcours de soins est l’une des principales réponses attendues pour faire face aux défis auxquels sont confrontés les systèmes de santé européens » : c’est ce qui ressort d’une enquête réalisée par Sopra Steria Consulting et Ipsos et publiée en juin dernier. La modernisation des systèmes de santé se révèle ainsi une priorité, tant pour les européens —pour lesquels le digital est essentiel— que pour les états, qui risquent de perdre leur souveraineté en matière de gestion des données numériques.

 

Aujourd’hui, les outils digitaux et les partenariats proposés par les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) proposent de nombreux services aux patients moyennant un accès à leurs données. Le risque de perte de pouvoir, et donc de souveraineté par rapport à ces données, est donc bien réel pour les Etats. Une réalité qui doit les encourager à réagir pour éviter la mainmise des géants du Net sur ces données. Autrement dit, le virage de la digitalisation doit être pris rapidement au risque de voir cette souveraineté s’envoler. Car si les géants du numérique parviennent à fournir des outils digitaux permettant aux patients d’exploiter leurs données de santé, il y a fort à parier que ceux-ci les leur confieront. Et ce, même s’ils expriment des inquiétudes par rapport à ces GAFAM, selon les résultats de cette même enquête.

Etat/Gafam : le match…

En matière de solutions digitales permettant d’améliorer les parcours de soins, 79% des Européens font confiance aux professionnels et établissements de santé. La tendance est encore plus forte dans l’hexagone, où 81% des Français se rangent à cet avis. De même, en matière de protection et de sécurisation des données, 79% des Européens font confiance aux professionnels et établissements de santé, leur confiance envers les GAFAM étant bien moindre. Par ailleurs, les états ne sont pas logés à la même enseigne. Si l’Estonie, la Norvège et la Belgique sont les pays ou le numérique est appliqué avec succès à la santé, la France est à la traîne, tout comme l’Allemagne et la Grande-Bretagne. En cause, le poids des mentalités mais aussi des systèmes de santé sous tension. Malgré la mise en place du RGPD en France, la digitalisation subit encore de nombreux freins.

Pour être efficace, la digitalisation du système de santé doit se penser dans son ensemble et non s’éparpiller entre un petit nombre d’acteurs. Car la technologie est disponible et certaines solutions digitales se révèlent efficaces. Cela suppose donc une volonté politique forte afin de permettre l’interopérabilité. De plus, pour généraliser la digitalisation à l’ensemble du parcours de soins, il est indispensable de se pencher sur son financement. A ce titre, certains experts évoquent des remboursements selon le degré d’efficacité des outils digitaux.

Digitalisation du parcours de soins : une urgence

En la matière, les Européens, et notamment les Français, sont unanimes : le système de santé s’essouffle... A l’heure où la crise des urgences atteint une ampleur inédite, le digital offre de nouvelles perspectives d’amélioration. L’intelligence artificielle, le big data ou l’internet des objets sont des plus utiles pour le suivi des maladies chroniques, la pertinence des diagnostics, l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie, la rapidité de prise en charge ou encore de qualité de suivi après une hospitalisation. De plus, les patients entendent être pleinement acteurs de leur prise en charge : ils considèrent la digitalisation comme un formidable outil pour les impliquer davantage dans leur parcours de soins, pour obtenir des conseils ou pour suivre des examens médicaux en fonction de leur âge ou de leur état de santé.

Reste que pour nombre d’Européens, aucune solution digitale n’est suffisamment développée, notamment pour le dossier médical partagé. De même pour les échanges de données entre professionnels de santé. Cependant, les Européens jugent utile le dispositif du dossier médical partagé pour accéder à l’historique de leurs soins, permettre une meilleure coordination entre professionnels de santé et améliorer la prévention. D’ailleurs, ils sont tout à fait prêts à donner accès à leur dossier médical électronique aux professionnels de santé qui les suivent. Mais si ces données de santé sont numérisées, elles restent encore cloisonnées. Cela signifie qu’il faut favoriser l’interopérabilité des échanges d’informations entre les acteurs de santé, et trouver une solution digitale structurant ce nouveau parcours de soin. In fine, cela traduit la nécessité de mettre en place une plateforme de type guichet afin d’enrichir, depuis un seul point, le dossier médical partagé.

Frédérique Guénot

 



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