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  • Qui veut voyager loin prend grand soin de ses vaccinations…

  • Les voyageurs se rendant en zones tropicale et intertropicale sont souvent anxieux vis-à-vis des risques liés aux maladies infectieuses, et très demandeurs de vaccinations et de conseils. Mais les vaccins des voyageurs ne concernent pas seulement les séjours tropicaux ! Vacciner un voyageur est assez simple en procédant par étapes. Les difficultés sont liées aux indications des vaccinations rares, nécessitant une source d’information fiable sur la destination du voyageur afin d’évaluer le rapport bénéfice/risque de telle ou telle vaccination, et au calendrier, beaucoup de nos concitoyens attendant le dernier moment pour consulter avant leurs voyages. Les bonnes vaccinations en fonction de chaque destination

    > La première étape c’est la mise à jour des vaccinations recommandées en France avec quelques particularités pour les voyageurs. Cette étape montre concrètement la fréquence des retards et absences de vaccinations ! Outre le rappel diphtérie-tétanos-poliomyélite +/- coqueluche si indiqué, tous les voyageurs, y compris ceux nés avant 1980, doivent avoir reçu deux doses de vaccins contre la rougeole (vaccin triple rougeole-oreillons-rubéole de préférence) quels que soient leurs antécédents vis-à-vis des trois maladies. Bien sûr les personnes ayant reçu deux doses de ROR dans leur vie n’ont pas besoin de se revacciner ; celles qui ont un antécédent documenté par une sérologie non plus.

    Mais la transcription d’un élément clinique souvent très ancien (carnet de santé) n’est pas suffisant et la demande d’une sérologie est peu intéressante, car longue et plus chère que la vaccination. Les enfants voyageurs doivent recevoir une dose de vaccin triple dès 9 mois (puis une deuxième dose à 12 mois) et les bébés de 6 à 9 mois doivent recevoir (Afrique et pays européens fortement touchés) une dose de vaccin monovalent contre la rougeole, qui devra être suivie de deux doses de vaccin triple ROR. Il faut être vigilant avec les enfants et les jeunes qui ne sont pas à jour vis-à-vis du calendrier vaccinal français. C’est l’occasion de rappeler, s’ils n’ont pas été réalisés et si l’indication est toujours d’actualité, l’intérêt de la vaccination contre l’hépatite B, contre le pneumocoque ou contre le BCG, en France comme en voyage. De plus, le BCG doit être proposé aux enfants se rendant en zone d’endémie plus d’un mois. Cela concerne notamment les expatriés et les enfants d’origine étrangère qui partent souvent pour 2 à 3 mois dans leurs familles restées au pays. Enfin, ne pas oublier la vaccination contre le méningocoque C pour les enfants de plus d’un an. La vaccination contre l’hépatite B doit être proposée (après  sérologie) à certains types de voyageurs en zone d’endémie : les expatriés, les séjours de longue durée ou aventureux ou itératifs. En effet, le risque principal des séjours hors des pays développés est le risque traumatique, donc avec une exposition au sang, qui vient s’ajouter au risque sexuel de l’hépatite B. Il existe des protocoles rapides permettant d’immuniser un adulte en 21 jours (J0, J7, J21 et M12) et les enfants en 2 mois (M0, M1, M2 et M12).

    > La deuxième étape concerne les vaccins spécifiques aux voyages qui sont fréquemment indiqués pour une majorité de destinations et de type de voyage, y compris le « banal » voyage touristique de 15 jours. Le vaccin contre l’hépatite A, à faire 15 jours avant le départ, est conseillé assez systématiquement pour les voyageurs se rendant en région d’endémicité haute ou intermédiaire, même pour un très court séjour compte tenu de la grande contagiosité de cette maladie. Il faut faire une deuxième injection 6 à 12 mois après la première puis l’immunité est définitive. Les patients « fauchés » ou de plus de 50 ans peuvent préalablement faire un dosage d’IgG HA, la positivité rendant la vaccination inutile.

    Le vaccin contre la fièvre jaune doit être pratiqué dans un centre de vaccination agréé par le ministère de la Santé. La fièvre jaune sévit en Afrique tropicale et en Amérique du Sud. Pour certains États, elle est obligatoire, mais il est impératif de la réaliser si l’on se rend en zone d’endémie. Elle doit être faite dix jours avant le voyage et reste valable 10 ans. Elle peut être réalisée à partir de l’âge de 6 mois et chez une femme enceinte après appréciation du rapport bénéfice/risque. Comme pour tout vaccin vivant, les contres-indications liées au statut immunologique (maladies et/ou traitements) sont parfois difficiles à définir. Renforcer les conseils d’hygiène de l’eau, des aliments et des mains  Les vaccinations contre la typhoïde et les méningocoques ne doivent pas être systématiques : pour la typhoïde, surtout en raison d’un vaccin à efficacité passable et limité dans le temps (3 ans), pour les différents vaccins contre les méningocoques en raison d’une contagiosité faible.

    La vaccination typhoïde sera conseillée pour les séjours aventureux, longs, les expatriations, dans des pays à hygiène précaire comme en Inde et en Asie du Sud-Est. Les conseils d’hygiène de l’eau, des aliments et des mains devront être particulièrement renforcés. A noter qu’il existe un vaccin combiné hépatite A et typhoïde. La vaccination contre le méningocoque doit s’adresser aux personnes en contact étroit et prolongé avec la population locale, notamment les enfants. Cela exclut la plupart des séjours touristiques courts, même en zone épidémique ou endémique. Le vaccin méningococcique A+C peut être pratiqué dès six mois pour la valence A dominant en Afrique, si possible après avoir vacciné contre le méningocoque C 10 à 15 jours avant, pour les enfants de moins de 11 ans qui ne peuvent pas encore bénéficier du vaccin méningococcique conjugué A+C+Y+W135.

    Les enfants d’origine africaine séjournant plusieurs mois dans leur famille doivent être protégés par la vaccination. Les pèlerins se rendant à La Mecque doivent obligatoirement être vaccinés avec un vaccin tétravalent A+C+Y+W135 dix jours avant le départ.

    > En dernière étape, il faut s’interroger sur trois vaccins de voyageurs qui ont des indications très ciblées et peu fréquentes : la rage, l’encéphalite japonaise (réservée aux centres de vaccination agréés) et l’encéphalite à tiques. L’information fiable du praticien en matière de vaccinations et de voyage est facilement accessible par internet, gratuite et en français. Chaque année au mois de juin est publié dans le Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire, un numéro « Recommandations sanitaires pour les voyageurs » ; le Guide des vaccinations, Édition 2012 est téléchargeable sur le site de l’INPES ; trois sites institutionnels sont particulièrement intéressants pour leur mise à jour : le site du ministère des Affaires étrangères (un peu alarmiste certes), la partie internationale du site de l’Institut de veille sanitaire, le site d’alertes épidémiques de l’OMS ; enfin il faut signaler un duo de sites associatifs indépendants des industries du médicament et du voyage, www.medecinedesvoyages.net et mesvaccins.net. Avoir un contact facile avec le centre de vaccinations agréé le plus proche est aussi un élément de bonne pratique lorsqu’une situation est un peu compliquée. Sur le plan pratique, la plupart des vaccins peuvent être associés lors d’une même séance, mais sur des sites différents. Il n’y a pas de délais à respecter entre deux séances de vaccinations, sauf pour deux vaccins vivants (par exemple ROR et fièvre jaune) qui doivent être faits le même jour ou à 30 jours d’intervalle, et sauf contre-indication du RCP (qui est toujours une CI de précaution). On ne doit plus vacciner dans le fessier mais dans le deltoïde, et dans le vaste externe pour les enfants qui ne marchent pas encore. Si on pratique plusieurs injections dans le même deltoïde, laisser au moins quatre centimètres entre les deux points d’injection. La vaccination, la protection contre le paludisme et les piqûres de moustique sont les éléments majeurs de protection contre le risque infectieux grave en voyage. Les voyages de nos concitoyens à destination des tropiques se comptent en millions chaque année, faisant de la santé en voyage une problématique de santé publique pour laquelle le médecin généraliste est comme toujours en première ligne.  

    Dr Didier Seyler, Centre de vaccinations de la Ville de Marseille  

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