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  • La Santé des Français à l’ère du big data

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    Si l’usage de la data a considérablement modifié la physionomie de certains secteurs (marketing, vente) redessinant par-là les contours de diverses fonctions, le secteur de la santé n’a pas été épargné. En la matière, il y aurait même un fort potentiel de développement, la gestion des données se révélant des plus précieuses en médecine et en pharmacie. Et s’il a été possible, durant des années, de comprendre des pathologies individuelles grâce aux études chiffrées de divers organismes, la nature même de la donnée a changé. Aussi, à côté des statistiques classiques où les données sont agrégées après les faits, s’ajoutent des données individuelles, susceptibles d’intéresser les acteurs de la santé et de générer d’importantes baisses de coût.

    Ces données multiples pourraient indiquer un régime de traitement spécifique dans le cadre d’une pathologie ou identifier les meilleures stratégies de réussite. C’est ainsi que le volume de données recueillies et les possibilités de lier celles-ci à des patients permettront l’apparition d’une médecine prédictive puisqu’avec ces données il sera possible de cibler les bonnes personnes en fonction du risque de développer une pathologie par exemple. Une évolution renforcée avec la médecine participative, ou la collecte de données obtenues avec le quantified self. La data aura ainsi une vraie pertinence  pour les pathologies chroniques qui pourront être traitées à distance et en temps réel. Par ailleurs, les données génétiques vont permettre d’adapter les traitements à certains types de patients en fonction de leur profil. Les adaptations de diagnostic et de traitement seront possibles sous réserve de toujours qualifier, contextualiser et relativiser les données. De même, la gestion de ces données va donner naissance à une médecine plus pertinente avec des algorithmes décisionnels et des logiciels d’aide au diagnostic. Des outils tels que le super-calculateur Watson développé par IBM permettent déjà de prendre des décisions grâce à l’intelligence artificielle. Enfin, la collecte de données sur une plus large échelle, grâce aux bracelets connectés entre autres, permet d’en déduire des d’informations sur les effets secondaires de médicaments. Et tandis que la donnée ouvre un nouveau champ en matière de pharmacovigilance, la Cnil refuse l’ouverture de ces données à l’industrie du médicament.

    LA PROMESSE D’ECONOMIES  CONSIDERABLES

    Si l’exploitation des data ouvre des potentialités infinies, elle promet de belles avancées en matière d’économie de la santé, de nouvelles techniques permettant d’analyser les frais et dépenses de certains traitements, en utilisant les données liées aux demandes d’indemnisation par exemple. De fait, organismes de financement et agences gouvernementales pourront choisir les médicaments pour lesquels il sera pertinent de payer. De même, la décentralisation induite par le big data se posera comme une opportunité pour les politiques publiques puisqu’il sera possible d’externaliser des activités jusqu’alors à la charge des services publics. Les solutions personnalisées de suivi à distance permettront ainsi de maintenir le patient à domicile, d’améliorer sa qualité de vie. De même, les consultations à distance pour la prescription de médicaments courants seront la source de gains de temps et d’argent.

    Ainsi patients, professionnels de santé, mais aussi chercheurs et industriels, sans oublier les institutions et les autorités de santé, tous trouveront leur compte dans ce big data de la santé, dont les bénéfices sont estimés au bas mot à 300 milliards de dollars annuels, rien que pour les États-Unis. Reste que si le big data Santé est susceptible de réduire les coûts de santé et d’ouvrir la voie vers la médecine personnalisée, il soulève de nombreuses questions quant à l’accès et surtout aux conditions d’accès à ces données, sans oublier la question de savoir qui récupère ces données de santé. Il faut donc s’interroger sérieusement sur la façon de conjuguer intérêt collectif et protection des personnes tout en sachant se protéger de l’utilisation commerciale, voire frauduleuse, de ces données, phénomène sur lequel se sont penchés de nombreux experts au sein du HDI (Healthcare Data Institute), sorte de think tank créé en 2014 et dédié au big data.

    Frédérique Guénot

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