• Pr. PIA D'ORTHO : Traiter le SAHOS: entre éducation thérapeutique, PPC, OAM et médicament

Marie PIA D'ORTHO

Discipline : Pneumologie

Date : 25/04/2021


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TLM : De quoi parle-t-on exactement lorsque l’on évoque un syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) ?

Pr Marie-Pia d’Ortho : Le SAHOS correspond à la survenue, pendant le sommeil, d’interruptions totales de la respiration pendant au moins 10 secondes (apnées), ou de réductions d’au moins 30 % du débit respiratoire pendant 10 secondes (hypopnées). Ces pauses respiratoires s’accompagnent d’une désaturation en oxygène et d’une hypoxie intermittente qui provoquent à la fois une inflammation vasculaire et tissulaire. Les conséquences sont une augmentation du risque cardiovasculaire (hypertension artérielle, maladie coronarienne, insuffisance cardiaque, troubles du rythme, accident vasculaire cérébral), et des pathologies métaboliques (diabète, troubles du métabolisme lipidique, syndrome métabolique). La reprise respiratoire se fait par des micro-éveils réflexes qui fragmentent le sommeil et se traduisent le lendemain par une fatigue ou une somnolence excessive, et l’impression de ne pas avoir récupéré.

Quel est le mécanisme physiopathologique du SAHOS ?

Ce syndrome est le plus souvent dû à un collapsus des voies aériennes, favorisé par des anomalies anatomiques comme une déviation de la cloison nasale, une hypertrophie amygdalienne, une macroglossie, un rétrognathisme (menton en retrait) ou encore une obésité. Pendant la journée, ce phénomène est compensé par l’action dilatatoire des muscles pharyngés, mais leur hy-
potonie pendant le sommeil entraîne a minima un ronflement ou, plus grave, un SAHOS. L’âge, la consommation d’alcool, la prise d’hypnotiques mais aussi, moins connu, la présence d’œdèmes dans les membres inférieurs, favorisent sa survenue.

Quels sont les signes qui peuvent alerter un patient ?

Ces deux éléments de la consultation médicale sont indispensables, notamment pour écarter d’autres diagnostics, mais ils ne permettent pas d’affirmer l’existence d’un SAHOS. En cas de suspicion, et à moins d’être lui-même formé à la prise en charge de l’apnée du sommeil, le médecin généraliste doit nécessairement adresser son patient à un spécialiste. Ce dernier peut s’appuyer sur deux examens complémentaires : la polygraphie ventilatoire nocturne et la polysomnographie. Le premier, réalisé à domicile, enregistre les mouvements respiratoires, le débit d’air et l’activité électrique du cœur, et détecte les baisses de saturation en O2 ; le second, plus complet mais plus complexe, analyse la qualité du sommeil, et évalue la sévérité du SAHOS.


Comment celle-ci est-elle déterminée ?

Par l’Indice apnées hypopnées (IAH), qui correspond au nombre de pauses respiratoires par heure de sommeil, mais aussi par la présence de comorbidités et selon son retentissement pendant la journée : il est léger entre 5 et 15 pauses, modéré entre 16 et 30 pauses, et considéré comme sévère au-delà de 30 pauses, ou dès 15 pauses/heure dans un contexte cardiovasculaire sévère, ou encore à partir de 15 pauses/heure associées à une somnolence diurne sévère.

Sur quoi repose la prise en charge ?

Les traitements diffèrent suivant la gravité du SAHOS, ses symptômes et le contexte global. Le choix relève d’une décision pluridisciplinaire. Pour les formes légères, on se contentera des mesures hygiéno-diététiques qui visent à lutter contre les facteurs de risque évitables : perte de poids, activité physique, réduction de la consommation d’alcool (surtout le soir)... Les traitements à proprement parler, qui consistent à rouvrir les voies aériennes pendant le sommeil, sont indiqués dans les formes modérées et sévères. La ventilation en pression positive continue (PPC) est particulièrement indiquée dans les apnées sévères, tandis que l’orthèse d’avancée mandibulaire (OAM) est plutôt réservée aux formes modérées, sans maladie cardiovasculaire ou métabolique. Ce dispositif, qui suppose l’absence de contre-indications dentaires ou articulaires, peut toutefois être pres crit chez les patients sévèrement atteints, après échec ou intolérance au traitement par PPC. Il existe ainsi plusieurs parcours possibles.

Ces traitements sont-ils bien tolérés ?
Ces traitements symptomatiques doivent être suivis à vie et pendant toute la durée du sommeil, c’est très important d’en informer les patients lors de leur instauration. L’éducation thérapeutique joue donc un rôle majeur sur leur acceptation et leur tolérance. L’adhésion des patients dépend aussi de l’amélioration des symptômes, généralement très rapide.

Quelle est la proportion d’échec ?

La persistance d’une somnolence irréversible, malgré un traitement bien suivi, concerne entre 8 à 10 % des patients apnéiques. Un médecin somnologue peut alors leur prescrire un traitement éveillant, le solriamfétol, qui dispose d’une AMM pour améliorer l’éveil et réduire la somnolence diurne excessive chez les adultes atteints d’un SAHOS insuffisamment amélioré malgré un traitement primaire.

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