Pr P. Metellus : Une innovation pour le traitement des CBNPC avec métastases cérébrales
Discipline : Oncologie, Dépistage
Date : 08/10/2024
L’étude METIS, évaluant les champs électriques TTFields dans le traitement des cancers du poumon non à petites cellules (CBNPC) avec métastases cérébrales, est menée à l’hôpital Clairval à Marseille.
Le point avec le Pr Philippe Metellus, docteur en Neurochirurgie dans cet établissement.
TLM : Le dispositif Optune avec TTFields a-t-il déjà montré une efficacité dans le traitement des CBNPC avec métastases cérébrales comme dans celui des gliomes ?
Pr Philippe Metellus : Dans le gliome malin, le protocole de Stupp a été validé en 2005 comme traitement standard. Il associe une radio-chimiothérapie concomitante et adjuvante qui permet d’augmenter la qualité de vie et la survie des patients. Un nouvel essai clinique a été depuis mené dans le gliome de haut grade en France : à l’hôpital Clairval tout comme au CHU de Lille et à la Pitié-Salpêtrière (AP-HP). Ses résultats ont montré l’efficacité du dispositif médical expérimental appelé Optune® doté d’électrodes à haute intensité permettant d’envoyer ces champs électriques antimitotiques (TTFields) dans le site de la tumeur.
Ainsi, de petites électrodes sont placées sur la voûte crânienne pour délivrer un champ électrique à très basse intensité. Ce traitement permet, par des mécanismes physiopathologiques pas encore totalement élucidés, une amélioration de la survie chez ces patients. En effet, délivrer ce champ électrique de faible intensité perturbe la phase de réplication des cellules cancéreuses cérébrales.
TLM : Quels sont les principaux enseignements de l’essai clinique METIS dans les cancers du poumon non à petites cellules ?
Pr Philippe Metellus : Une étude METIS a été lancée pour évaluer l’innovation TTFields dans le traitement des CBNPC métastatiques cérébraux. L’hôpital Clairval a été le premier centre « inclueur » de patients en France. Le suivi de ces sept patients se terminera le 30 novembre 2024. Il s’agissait d’évaluer l’intérêt de ce dispositif, de manière adjuvante au traitement standard (Stupp) dans les métastases cérébrales. Les patients présentant des métastases cérébrales consécutives à un CBNPC sont habituellement traités par radiochirurgie, avec une probabilité importante de récidive cérébrale rapide. Dans cette étude, ont été inclus les patients avec des métastases cérébrales (entre 1 et 10), traitées par radiochirurgie exclusivement ou par chirurgie et radiochirurgie. Les résultats intermédiaires de phase III dévoilés en mars montraient que l’essai clinique de phase 3 avait atteint son critère principal, démontrant un allongement statistiquement significatif du délai médian jusqu’à la progression intracrânienne chez les patients porteurs de métastases cérébrales consécutives.
Suite à ces résultats intérimaires favorables, une nouvelle étude en vie réelle TIGER a été lancée dans les gliomes, avec le dispositif TTFields.
TLM : Pourrait-on qualifier les TTFields de véritables innovations dans le traitement des CBNPC ?
Pr Philippe Metellus : Ce dispositif représente une avancée en utilisant une stratégie innovante. Les moyens physiques, comme les TTFields, sont de plus en plus utilisés pour traiter des lésions du génome ou pour franchir la barrière hémato-encéphalique afin d’améliorer le traitement médical. Toutefois, l’un des écueils les plus importants de cette stratégie est illustré par la nécessité de raser le crâne du patient, pour y placer des électrodes, ce qui est psychologiquement parfois mal vécu et difficilement accepté par certains patients, notamment les femmes. Et ce même s’il existe des dispositifs de prothèses capillaires qui sont pris en charge dans le cadre de ce dispositif. Autre frein : se déplacer avec une machine qui délivre ce champ électrique, placée dans un sac à dos ou une petite valisette. A cet égard, des progrès ont été réalisés grâce à l’évolution technologique du dispositif. Lorsque la première étude clinique sur le gliome a débuté, l’appareil portatif était assez encombrant.
Aujourd’hui, son volume a été nettement réduit. Enfin, la durée : pour qu’il soit efficace, le traitement doit être délivré sur une durée de 18 heures par jour et ce pour une durée illimitée. Signalons quelques effets secondaires classiques de réaction épidermique et d’allergies. Les ondes électriques, même si elles sont de très basse intensité, peuvent engendrer des douleurs et des sensations d’irritation. Certaines personnes ne supportent donc pas le dispositif. En outre, celui-ci se décolle, l’été, avec la sudation. Il reste que nous sommes convaincus de l’efficacité de ce dispositif pour les métastases cérébrales dans les CBNPC et les gliomes, et ce en dépit d’un traitement qui reste assez contraignant et qui peine à emporter l’adhésion du patient.
TLM : Le dispositif TTFields pourrait-il être indiqué pour traiter d’autres cancers avec métastases cérébrales ?
Pr Philippe Metellus : Tout à fait. Si l’efficacité en termes de contrôle de la maladie métastatique cérébrale est complétement démontrée, ce dispositif pourrait être utilisé pour traiter des cancers du sein et du côlon et des mélanomes qui sont, après les tumeurs du poumon, les plus grands pourvoyeurs de métastases cérébrales. Nous attendons les résultats définitifs de l’étude METIS pour ouvrir éventuellement d’autres essais cliniques dans d’autres cancers.
Propos recueillis
par Christine Colmont ■
Le critère principal atteint dans l’essai METIS L’essai METIS de phase III a montré que le délai médian avant progression intracrânienne était de 21,9 mois chez les patients traités avec la thérapie Tumor Treating Fields (TTFields) et des soins de support, contre 11,3 mois chez les patients traités uniquement avec des soins de support METIS. Au total, 298 patients adultes, porteurs de 1 à 10 métastases cérébrales consécutives à un CBNPC, ont été inclus. Le critère d’évaluation principal de l’essai METIS était le délai avant la première progression intracrânienne, mesuré à partir de la date du premier traitement par RCS jusqu’à la progression intracrânienne ou le décès neurologique (en vertu des critères RANO-BM).