• Pr. MICHEL : Pour éviter que rhume et sinusite évoluent en infection bactérienne...

Justin MICHEL

Discipline : ORL, Stomatologie

Date : 01/02/2021


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TLM : Quels sont les signes et l’étiologie du rhume et de la sinusite ?
Pr Justin Michel :
Le rhume est une infection virale, le plus souvent causée par des rhinovirus, dont les symptômes sont le nez bouché, le nez qui coule et parfois un peu de fièvre ou des maux de tête. Le plus souvent, il guérit spontanément en une semaine. Dans un faible nombre de cas, le rhume peut toutefois dégénérer en une infection bactérienne : la sinusite. Dans 90% des cas, la sinusite est secondaire à un rhume (rhinogène) et il s’agit, le plus souvent, d’une atteinte des sinus maxillaires aigus (situés derrière les joues). Les signes sont une pesanteur voire une douleur sous l’œil, un nez purulent et un peu de fièvre. Les patients ayant un système immunitaire affaibli, à cause d’un diabète ou d’un traitement immunosuppresseur, sont plus à risque. Certaines personnes souffrent en outre de sinusite chronique, avec des poussées de réchauffement qui ressemblent à des sinusites aiguës mais sans rhume préalable.

Existe-t-il des risques de complications ?

uOui. Lorsque le pus est bloqué dans les sinus, cela forme un abcès douloureux qui peut conduire à des complications (au niveau orbitaire par exemple). Toutefois, les complications ophtalmologiques ou neuronales (méningites, abcès cérébraux...) sont exceptionnelles dans le cas des sinusites maxillaires rhinogènes. Elles peuvent survenir lorsque c’est un des autres sinus (frontal, sphénoïdal ou ethmoïdal) qui est atteint, lorsqu’une autre cause à l’infection bactérienne est retrouvée comme un problème dentaire ou encore si le patient est fragile (immunité faible). En cas de sinusite d’origine dentaire on parle de sinusite odontogène et le patient se plaint fréquemment d’une mauvaise odeur dans le nez.

uDans le cas d’un rhume ou d’une sinusite rhinogène sans complications, l’exploration n’est pas nécessaire. En revanche, sur des terrains fragilisés, en cas de suspicion d’une atteinte d’un autre sinus que le maxillaire ou face à une suspicion de sinusite dentaire, il faut explorer à l’aide d’un scanner ou Cone Beam pour confirmer le diagnostic ou l’origine dentaire. Une autre exploration possible est le prélèvement bactériologique dans le pus du nez, en cas d’échec du traitement antibiotique, sur un terrain particulier ou en cas de suspicion de complication. Quelle prise en charge en médecine générale ?

Quand et comment explorer ?

uLe traitement d’un rhume est symptomatique. On recommande un lavage du nez deux fois par jour, du paracétamol contre d’éventuels maux de tête ou une légère fièvre, un spray décongestionnant (chez l’adulte et pendant cinq jours maximum) et/ou des corticoïdes locaux. Ces traitements locaux vont limiter le développement d’une sinusite aiguë. Toutefois si le rhume évolue mal, avec l’apparition des symptômes dits « FORD » (fièvre, obstruction et douleurs), évoquant une sinusite, il faut donner des antibiotiques pendant 7 à 10 jours, tout en continuant les traitements symptomatiques comme le lavage du nez. Dans 80 à 90% des cas, cela évolue bien. Dans le reste des cas, l’avis d’un ORL est nécessaire. Par ailleurs, si le praticien suspecte un terrain fragile, l’atteinte d’un sinus autre que maxillaire (notamment en cas de douleurs au-dessus, derrière l’œil ou au sommet de la tête), alors il pourra prescrire d’emblée un traitement antibiotique plus fort et un bilan par imagerie. Si le résultat est anormal, il conviendra d’adresser le patient à l’ORL.

Quelles techniques de lavage nasal recommandez-vous ?
u Il existe différentes techniques de lavage du nez dont l’objectif est d’éliminer le mucus en excès, ou le pus en cas de sinusite bactérienne, et de diminuer en même temps la charge virale ou les bactéries. Le spray d’eau de mer acheté en pharmacie a un faible volume de liquide mais il offre plus de pression. La deuxième technique, appelée irrigation nasale grand volume, utilise un récipient réutilisable à remplir d’eau (éventuellement tamponnée de bicarbonate de soude) et de sels. Grâce à un grand volume (200 à 400 ml), elle permet un lavage des cavités nasales avec une moindre pression. Toutefois, certains patients n’aiment pas la sensation de « boire la tasse » et une mauvaise concentration en sels peut donner des sensations de brûlures. Lorsqu’on ajoute du sel de table, il faut donc veiller à respecter le dosage pour atteindre une concentration en chlorure de sodium de 9 g/L correspondant au taux sanguin. Les mélanges de sels miné

raux en sachets pré-dosés achetés dans le commerce sont une autre solution. Certains fabricants ajoutent des agents anti-infectieux (soufre, cuivre). D’autres proposent des mélanges de sels, proches de la composition du liquide extracellulaire, qui favoriseraient l’efficacité des battements ciliaires et la cicatrisation de la muqueuse. L’essentiel est que le patient choisisse la méthode qui lui convient le mieux afin de favoriser l’observance, en particulier en cas de sinusite chronique.

Propos recueillis par Eva Utrecht

 

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