• Pr. GOURDY : Les agonistes des récepteurs du GLP-1 incontournables du diabète de type2

Pierre GOURDY

Discipline : Métabolisme, Diabète, Nutrition

Date : 25/04/2021


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TLM : Quelles sont les indications des agonistes des récepteurs du GLP-1 ?
Pr Pierre Gourdy :
Ces traitements représentent une des options de deuxième ligne de traitement chez les personnes
souffrant d’un diabète de type 2, en association à la metformine qui reste le traitement de référence en première intention. La combinaison de ces deux classes thérapeutique est associée à un risque négligeable d’hypoglycémie. Il faut par contre se méfier en cas d’association à un sulfamide/glinide ou à l’insuline. Les agonistes des récepteurs du GLP-1 sont également indiqués en troisième intention, après échec de toute bithérapie. Désormais, ils s’imposent en cas de maladie cardiovasculaire avérée et représentent une réponse souvent appropriée en situation d’obésité (IM>30). Les recommandations nationales et internationales plébiscitent en ou
tre leur utilisation avant celle de l’insulinothérapie, qui présente plusieurs inconvénients (risque d’hypoglycémie, prise de
poids) et n’est pas facile à adapter dans le contexte d’insulinorésistance... Dans les cas plus complexes, ces molécules présentent par ailleurs un intérêt en association à l’insuline basale (efficacité identique en limitant le risque d’hypoglycémie et la prise de poids), offrant une alternative à l’introduction d’injections d’insuline rapide avant les repas.

Comment agissent ces médicaments ?

Ils agissent au niveau du pancréas endocrine en favorisant la sécrétion d’insuline et en freinant celle de glucagon. Un des avantages de ces molécules est que l’effet stimulant la sécrétion d’insuline ne s’exerce que si la glycémie est trop élevée, ce qui explique le faible risque hypoglycémique par rapport à d’autres médicaments. Ces traitements retardent également la vidange gastrique avec un effet bénéfique sur la glycémie post-prandiale. Enfin, ils ont aussi une action au niveau du système nerveux central, plus particulièrement sur la régulation de la prise alimentaire, favorisant l’amaigrissement et un meilleur équilibre métabolique.

En France, le premier agoniste des récepteurs du GLP-1 date de 2007 ; y a-t-il eu des progrès depuis ?
 

Cette classe thérapeutique, développée au début des années 2000, a connu d’immenses progrès au fil des ans, tant dans la présentation des molécules que dans l’amplitude de leurs effets. On est ainsi passé de molécules nécessitant deux injections sous-cutanées quotidiennes à une seule injection par jour, voire, pour certaines, une injection hebdomadaire. La commercialisation d’un agoniste du récepteur du GLP-1 administré par voie orale est également attendu dans les années à venir. Des progrès notables ont également été observés en matière d’efficacité, les dernières molécules permettant un meilleur contrôle de la glycémie et une perte pondérale plus importante, de l’ordre de 5 à 6 kilos en moyenne. Celle-ci dépend, bien sûr, de la réponse individuelle de chacun, mais aussi des propriétés pharmacologiques des agonistes des récepteurs du GLP-1 dont les effets sur le système nerveux central sont plus ou moins marqués.

Quels effets ces médicaments ont-ils sur le système cardiovasculaire ?

La sécurité cardiovasculaire de l’ensemble de la classe thérapeutique a été parfaitement validée par plusieurs grands essais randomisés et contrôlés. Certaines molécules ont même fait la preuve de leur capacité à réduire d’environ 12% le risque d’événement cardiovasculaire majeur (décès d’origine cardiovasculaire, infarctus du myocarde, AVC) chez des patients diabétiques de type 2 à haut risque cardiovasculaire, présentant une maladie athéromateuse avérée et/ou cumulant les facteurs de risque. Nous espérons que ces nouvelles données seront prises en compte par la Haute Autorité de santé dans l’élaboration de ses nouvelles recommandations en matière de prise en charge des patients atteints d’un diabète 2, qui sont attendues d’ici la fin de l’année. Ils ne sont, néanmoins, pas dénués d’effets secondaires...

 En effet. Ceux-ci sont surtout d’ordre digestif (nausées, voire vomissements), en lien direct avec un de leurs mécanismes d’action ciblant la vidange gastrique. Si les nausées sont relativement fréquentes au tout début du traitement, elles s’estompent en général en quelques semaines ; une augmentation progressive des doses pour la plupart des molécules permet de limiter cet effet. Le risque de diarrhée existe également, et l’effet anorexigène peut parfois s’avérer plus marqué qu’attendu. En cas d’amaigrissement rapide, il existe également un sur-risque de lithiase biliaire. Attention, au-delà de l’effet de cette classe thérapeutique, une perte de poids spontanée chez un patient diabétique de type 2 doit systématiquement faire évoquer une insulinopénie : le médecin doit savoir la repérer, rechercher d’éventuels facteurs pathologiques intercurrents et initier un traitement par insuline si nécessaire. Quelle est, précisément, la place des médecins généralistes ?

Comparé à l’insuline, le rythme d’injection des agonistes des récepteurs du GLP-1 et l’adaptation des doses sont beaucoup plus simples car prédéfinis et codifiés au moment de la prescription ; les médecins généralistes peuvent donc tout à fait en être les premiers prescripteurs. Il leur revient alors de présenter les bénéfices et les risques de ces médicaments et d’accompagner leurs patients dans leur prise en charge. Ils doivent par ailleurs s’assurer de la bonne tolérance du traitement et proposer des mesures diététiques pour, sinon prévenir, du moins limiter les risques digestifs : éviter en particulier les repas trop copieux, fractionner intialement l’alimentation si besoin... Une réévaluation à trois mois, associée à une mesure du poids et du taux d’HbA1c, est suffisante, mais doit être plus rapprochée chez les patients dont la pathologie, plus complexe, nécessite un ajustement des doses des traitements associés, tout particulièrement les sulfamides hypoglycémiants et l’insuline.

Quelles sont les raisons qui doivent conduire à l’arrêt de ce traitement ?

La persistance d’effets indésirables et l’absence de réponse au traitement, définie par la HAS comme une baisse du taux d’HbA1c inférieure à 0,5 % au cours des six mois suivant leur initiation. On peut néanmoins émettre un bémol vis-à-vis de ces recommandations datant de 2013 : si la prévention cardiovasculaire le justifie, le maintien du traitement reste préconisé.
 

Diriez-vous que les agonistes des récepteurs du GLP-1 ont modifié la prise en charge du diabète de type 2 ?
Je dirais même que ces traitements l’ont bouleversée ! Certes, ils ont un coût plus élevé que les autres classes thérapeutiques, mais leur efficacité métabolique en association à la metformine peut permettre d’éviter l’empilement d’autres anti-diabétiques et, surtout, leur bénéfice chez les sujets à haut risque cardiovasculaire et/ou en situation d’obésité peut les rendre incontournables dans certains contextes cliniques.

Propos recueillis par Charlotte Montaret

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