• Pr. GAME : Evaluation et traitement initial de l’HBP ressortent du médecin généraliste

Xavier GAME

Discipline : Uro-Néphrologie

Date : 19/10/2020


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TLM : Dans quel contexte clinique doit-on évoquer une HBP ?
Pr Xavier Gamé :
Elle doit être évoquée chez l’homme en cas de troubles mictionnels et de symptômes du bas appareil urinaire (dysurie ou hyperactivité vésicale). Attention, les problèmes prostatiques peuvent être responsables de ces troubles, mais ce n’est pas du tout systématique. On pourra encore y songer lorsqu’un patient se présente avec des complications comme une rétention complète d’urine, des infections urinaires récidivantes, une hématurie récidivante... Mais dans ces cas-là, le patient voit généralement directement un urologue.

 

Quel tableau permet d’établir le diagnostic, à la fois clinique et résultats d’examens complémentaires ?

A l’interrogatoire, les difficultés pour uriner vont faire évoquer un problème prostatique. Face à un patient de plus de 50 ans, on a davantage de chances d’avoir affaire à une HBP. Ensuite, il y a plutôt un ensemble d’examens et de signes cliniques qui permettent d’établir un diagnostic différentiel. Le toucher rectal permet de vérifier qu’on n’est pas en présence d’un cancer sous-jacent ou associé, mais ne permet pas de faire le diagnostic. L’échographie vésicale laissera voir s’il existe un résidu d’urine. Le seul examen qui montre une obstruction sous-vésicale, c’est une étude pression débit et c’est l’urologue qui décide de la pratiquer ou non. La débimétrie est le seul examen susceptible d’affirmer qu’il y a une dysurie, mais il n’est pas pratiqué en médecine de ville. Il sera donc effectué lorsque le médecin généraliste aura adressé le patient à l’urologue. En pratique, le médecin généraliste doit demander au patient d’établir un calendrier mictionnel, permettant d’en savoir
plus sur la phase de remplissage vésical. Par ailleurs, aujourd’hui, les applications mobiles offrent la possibilité de récolter des informations importantes via le patient. Bientôt, il pourra récolter des données grâce à son téléphone portable, avec à la clé des résultats proches de la débimétrie. Enfin, les médecins généralistes doivent noter que la nycturie n’est pas forcément liée à un problème prostatique. C’est un message important à faire passer. Certains patients ont pu être opérés à tort, alors que la nycturie peut être liée à une augmentation de production d’urine la nuit.

 

Quelles sont les complications aiguës et chroniques d’une HBP ?

Il faut penser à la rétention aigüe d’urine, à l’insuffisance rénale, à l’hématurie récidivante et aux calculs urinaires.

 

Quel rôle occupe le médecin généraliste dans la prise en charge de l’HPB ?

Il a un rôle dans la première intention. Il détecte les premiers symptômes, il fait une évaluation initiale. Il va pouvoir donner un premier traitement, soit par phytothérapie ou alphabloquants. Il est important aussi que le médecin généraliste parle au patient de sa sexualité : en cas de troubles de l’érection, certains traitements pourront être privilégiés, comme le tadalafil, qui traite les problèmes d’érection tout en agissant sur les conséquences de l’HBP.

 

Peut-on rappeler les indications des différentes familles médicamenteuses dont dispose le médecin dans la prise en charge de l’HBP ?

Le médecin peut prescrire un traitement par phytothérapie. Ces médicaments présentent peu d’effets secondaires mais sont d’action lente. Si le patient est très gêné, on choisit généralement les alpha-bloquants pour leur action rapide. Ensuite, on pensera aux inhibiteurs de la phosphodiestérase comme, par exemple, le tadalafil pour les patients ayant des troubles sexuels associés et les inhibiteurs de la 5-alpha réductase, qui seront prescrits si besoin par l’urologue.

 

Est-on certain de l’efficacité des médicaments à base de plantes ?
Il existe une réelle preuve d’efficacité des médicaments de prescription en phytothérapie, avec de réels principes actifs. En revanche, certains médicaments en vente libre, et qui n’ont pas connu les mêmes méthodes d’extraction de la plante, sont peu efficaces. Il y a donc un amalgame dont on doit se garder car ce sont deux éléments différents.

 

Quand adresser au spécialiste ?

Lorsque le traitement n’est pas efficace, le médecin peut adresser à l’urologue. Tout en prenant en compte qu’il faut savoir patienter un à trois mois avant d’obtenir des résultats de certains traitements. Et également, bien sûr, en cas de complications.

 

Quelle est la place de la chirurgie dans la prise en charge de l’HBP ?

La chirurgie a sa place uniquement en cas de complications ou d’échec des traitements médicalementeux.


L’AFU prépare-t-elle de nouvelles recommandations? Quelles sont les nouveautés attendues ?

Oui, c’est en cours, et les nouveautés concerneront davantage les aspects chirurgicaux de la prise en charge de l’HBP.
La crise de la Covid a-t-elle modifié la prise en charge de l’HBP? uOui, la chirurgie dans le cadre de l’hypertrophie bénigne de la prostate a été considérée comme non urgente... Certains patients ont dû attendre. On a privilégié des opérations de cancers. Donc un certain nombre de patients ont dû garder des sondes, ce qui a pu engendrer des complications.

 

Propos recueillis par Emilie Soulez

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