• Pr Gaëtan Gavazzi : Zona : Pour les séniors la prévention passe par la vaccination

Gaëtan Gavazzi

Discipline : Infectiologie

Date : 08/01/2025


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Maladie fréquente, le zona peut provoquer des douleurs et des séquelles très importantes. Pourtant la prévention est possible grâce à un vaccin efficace. Le point avec le Pr Gaëtan Gavazzi, chef du service de Gériatrie au CHU de Grenoble-Alpes.

 

TLM : Combien de cas de zona recense-t-on chaque année en France ?

Pr Gaëtan Gavazzi : il s’agit d’une maladie assez répandue, avec 250 000 à 300 000 cas par an. Elle survient soit à la suite d’une immunodépression soit après 50 ans. L’incidence et la gravité augmente avec l’âge. Plus de 50 % des cas de zona surviennent après 60 ans. On compte ainsi près de 10 cas pour 1 000 personnes chez les plus de 80 ans.

 

TLM : Quels sont les symptômes du zona ?

Pr GaPetan Gavazzi : Il se manifeste par une éruption de vésicules et des douleurs qu’on appelle « zostériennes ». Ces dernières sont très violentes, sourdes et rapides, de type neuropathique, comme des brûlures ou des décharges électriques. La grande complication du zona, c’est la douleur post-zostérienne : le zona se termine en une dizaine de jours mais des douleurs peuvent demeurer. Plus on est vieux, plus le risque de douleurs post-zostériennes augmente : un tiers des patients de plus de 80 ans, en souffrent trois mois après le zona et plus de 10 % à un an.

 

TLM : Comment survient cette maladie ?

Pr GaPetan Gavazzi : Il faut avoir eu une varicelle. Le virus varicelle-zona reste hébergé dans l’organisme, au fond des ganglions spinaux. Le système immunitaire le contient. Mais, à l’occasion d’une immunodépression ou en raison de l’immunosénescence, ce virus peut se réactiver : il chemine alors le long des nerfs et réapparaît au niveau de la peau sous forme d’un placard inflammatoire et de vésicules. Chaque zone cutanée qui présente un zona correspond en fait à un ganglion spinal. Plus de zones sont touchées et plus le risque de développer des douleurs post-zostériennes est élevé.

 

TLM : Le zona oculaire est-il fréquent ?

Pr GaPetan Gavazzi : Non, mais il est grave car il atteint la muqueuse de l’œil : il peut ainsi entraîner des douleurs post-zostériennes dans l’œil et provoquer des complications comme des troubles de la vision qui peuvent aboutir à la cécité d’un œil, notamment si le zona s’infecte. Le zona de l’oreille est également sévère et peut entraîner des atteintes motrices.

 

TLM : Quels sont les traitements ?

Pr GaPetan Gavazzi : On peut prescrire un traitement antiviral, mais il faut l’administrer très tôt, au plus tard dans les 48 heures après le début des symptômes. L’objectif ici est de diminuer la durée du zona, mais il n’est pas certain que ce traitement antiviral réduise le risque de douleurs post-zostériennes. Ces médicaments, l’acyclovir intraveineux ou le valacyclovir oral, qui sont prescrits également pour la varicelle et l’herpès sévère, présentent une efficacité modérée. On ne les prescrit pas pour les cas modérés. Sans traitement, l’éruption va se résorber en deux à trois semaines. Il faut recourir aux soins locaux pour éviter l’infection. Bien entendu, il faut prendre en charge rapidement la douleur par des antalgiques jusqu’à utiliser des dérivés morphiniques, des antiépileptiques ou des antidépresseurs si les douleurs ne sont pas calmées par des antalgiques simples.

 

TLM : Quel est l’impact du zona sur la qualité de vie ?

Pr GaPetan Gavazzi : L’impact est extrêmement important. Cette maladie a des conséquences sur la vie sociale et le fonctionnement cognitif : ces douleurs représentent une épreuve car elles peuvent durer plusieurs mois, elles empêchent de sortir de chez soi ou de pratiquer des activités. Elles sont parfois traitées par des psychotropes, avec des risques de somnolence, de troubles cognitifs (par exemple des difficultés attentionnelles) et des troubles de l’équilibre.

Sans oublier un risque élevé de dépression. L’impact est encore plus important chez les personnes âgées : chez elles, l’apparition d’un zona peut entraîner une perte définitive d’autonomie.

 

TLM : Quels sont les moyens de prévention ?

Pr GaPetan Gavazzi : C’est la vaccination. Elle existe depuis 2013, avec un vaccin qui présentait une efficacité modérée chez les personnes âgées, il évitait une fois sur deux le zona, et diminuait la sévérité de la maladie. Il n’était pas indiqué pour les personnes immunodéprimées car fabriqué à partir d’un virus vivant.

Mais un nouveau vaccin, Shingrix, produit avec de la chimie pure, vient d’arriver sur le marché. Il cible une protéine spécifique du zona et contient un adjuvant qui booste l’immunité cellulaire.

 

TLM : Quelle est l’efficacité de ce vaccin ?

Pr GaPetan Gavazzi : Il présente 90 % d’efficacité, quel que soit l’âge. Donc une efficacité très importante. On sait que près d’un individu sur quatre va développer un zona au cours de sa vie, avec l’impact que l’on sait. Près de 1/1000 aura une récidive. Et il existe un moyen de l’éviter. Il n’y a donc pas à hésiter. On a la possibilité de voir quasiment disparaître le zona demain si tous les plus de 65 ans et les personnes à risque se faisaient vacciner.

 

TLM : Quelles sont les modalités d’administration de vaccin ? Présente-t-il des effets secondaires ?

Pr GaPetan Gavazzi : Il nécessite deux doses espacées au minimum de deux mois, de six mois au maximum. Si la personne a déjà reçu le vaccin Zostavax ou si elle a eu un zona, un délai d’un an est nécessaire avant de commencer la vaccination par les deux doses de Shingrix. Il ne présente pas d’effets secondaires graves mais des effets fréquents comme un peu de fièvre, une rougeur, une douleur pendant 24 heures au point d’injection, comme pour d’autres vaccins.

 

TLM : Que recommandent les autorités de santé ?

Pr GaPetan Gavazzi : La HAS recommande la vaccination des personnes immunodéprimées de 18 ans et plus, ainsi que celle des adultes de 65 ans et plus avec le nouveau vaccin. Le vieillissement est un facteur de risque et le bénéfice du vaccin est évident. Il faut inciter toutes les personnes concernées à réaliser cette vaccination. Une campagne de communication et de sensibilisation serait d’ailleurs fort utile.

 

TLM : Quel est le rôle du médecin généraliste dans cette vaccination ?

Pr GaPetan Gavazzi : Les médecins généralistes, comme tous les professionnels de santé, doivent avertir les plus de 65 ans des risques encourus : un tiers de la population va développer un zona, avec des douleurs et des complications importantes. Tout cela peut être évité par un vaccin.

Propos recueillis

par Mila Maruani

Shingrix désormais remboursé Shingrix est désormais remboursé par l’Assurance maladie pour les personnes de 18 ans et plus dont le système immunitaire est défaillant, ainsi que chez toutes les personnes âgées de 65 ans et plus (arrêté du 5 décembre 2024 paru dans le Journal officiel du 10 décembre 2024). Outre les médecins, les pharmaciens d’officine, les infirmiers, les biologistes médicaux peuvent maintenant prescrire et administrer Shingrix.

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