• Pr. DE GABORY : Infections des voies respiratoires supérieures de l’adulte

Ludovic DE GABORY

Discipline : Infectiologie

Date : 19/10/2020


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TLM : Quelles sont les infections respiratoires des voies supérieures (IVRS) les plus fréquemment observées ?

Pr Ludovic de Gabory : Les muqueuses des voies respiratoires supérieures sont soumises au contact de nombreux pathogènes du fait de nos 22 à 25 000 cycles respiratoires par 24 heures. Certains virus se distinguent par leur affinité pour ces muqueuses. Dans les infections virales sont impliqués 30 à 50% derhinovirus,20 à 30% de virusinfluenza A et B, 10 à 15% decoronavirus et d’autres, plus anecdotiques. Les IVRS sont majoritairement des phénomènes aigus où l’on retrouve la rhinopharyngite, la grippe... On note aussi des infections bactériennes, à l’origine notamment de la sinusite bactérienne purulente qui, comparativement aux infections virales, reste rare, de l’ordre de 1 pour 1 000.

 

A quoi doit-on être attentif devant une IVRS ?
Les infections virales sont normalement de résolution spontanée. Elles sont toutefois fréquemment confondues avec des rhinites allergiques du fait de la concordance des symptômes. A l’inverse, l’allergie n’empêche pas le développement d’une infection. Les allergènes ne pouvant entrer dans les sinus, une plainte sinusienne chez un patient allergique doit faire évoquer une infection. L’interrogatoire est donc déterminant.

 

Comment distinguer une infection virale d’une sinusite bactérienne ?
Le rhume se caractérise par des douleurs légères à modérées (< 5/10) à type de pesanteur faciale, de lourdeur, sensible au paracétamol et aux AINS, non insomniante. La clé est dans la temporalité de l’apparition des symptômes. L’infection commence par un syndrome pseudo-grippal (fébricules, myalgies, courbatures) suivi de symptômes rhinologiques (obstruction nasale, sensation de brûlure de la muqueuse, rhinorrhée claire et bilatérale) 24 à 48 heures après. 24 à 36 heures plus tard, elle devient plus opales-cente, puis blanchâtre après le même délai, puis jaune et enfin verte. Il ne s’agit pas pour autant de pus mais de sécrétions inflammatoires. Elles sont formées de cytokines et de chémokines avec peu de cellules mortes sauf dans la dernière phase où l’épithélium desquame. Elle est alors souvent prise, à tort, pour une surinfection et ne nécessite pas de traitement antibiotique. A l’inverse, la sinusite bactérienne purulente a pour maître symptôme une douleur (d’une intensité >7-8/10), résistante aux antalgiques de paliers I, insomniante, rapidement accompagnée de pus. Elle impose un traitement antibiotique, suivant les recommandations de l’Afssaps de 2011.

 

Quelles sont les complications potentielles des IVRS ?
La complication du rhume est la sinusite ou l’otite moyenne ou la laryngite aiguës. La grippe et le COVID peuvent aussi entraîner des complications fonctionnelles telles que l’anosmie. Si le handicap reste limité, elle peut avoir un retentissement important en termes de qualité de vie. En l’absence de récupération après l’épisode infectieux, il est donc conseillé de réorienter le patient vers un service spécialisé.

 

Quels sont vos recommandations de prise en charge des infections virales ?
Le traitement est essentiellement symptomatique: du paracétamol ou des AINS à dose antalgique, des vasoconstricteurs pour améliorer la qualité du sommeil et le lavage de nez. Il pourra être hypertonique en phase aiguë, pour son effet décongestionnant, puis isotonique au long cours.

 

Existe-t-il des recommandations sur la réalisation du lavage de nez ?

Il doit être adapté à la taille des fosses nasales, atteignant 20 cm3 chez l’adulte. Le volume de liquide doit correspondre à au moins trois fois celui de la cavité, limitant l’intérêt du spray chez l’adulte. Il est en outre démontré que la composition de la solution de lavage doit se rapprocher de celle l’eau de mer (minéraux, pH légèrement basique, tamponné), dont l’effet thérapeutique est démontré, alors que le sérum physiologique est toxique pour les cellules de la muqueuse (risque de rhinite orthoergique). Le lavage de nez, une fois par jour, exerce aussi un effet préventif sur le nombre et l’intensité des rhumes chez les sujets sensibles. Le lavage doit se faire en douceur, à faible pression. Ce doit être un soin confortable, parfaitement indolore. Il peut être ainsi inclus dans le rituel de toilette. Un article sur le sujet ainsi que des vidéos de démonstration devraient prochainement être mises à la disposition par la Société française d’ORL. Le lavage de nez doit aussi être étendu aux personnes travaillant en atmosphère poussiéreuse, pour limiter le risque de rhinite irritative et/ou allergique.

 

 

Propos recueillis par Sabine Casalonga

 

 

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