• Pr. DE BONNECAZE : Prendre en charge la rhinite et les irritations nasales

Guillaume DE BONNECAZE

Discipline : ORL, Stomatologie

Date : 19/10/2020


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TLM : Quels sont les différents types de rhinites ?
Pr Guillaume de Bonnecaze :
Les formes les plus fréquentes sont les rhinites infectieuses (20 à 25 %) et les rhinites allergiques (20 à 25%), dont la plus connue est « le rhume des foins ». Ensuite on retrouve des rhinites non allergiques non infectieuses dont les plus courantes sont les rhinites inflammatoires à éosinophiles. Ces rhinites, sans cause évidente, représentent 30 à 40 % de l’ensemble des rhinites chroniques chez l’adulte. Enfin, les 10 % restants sont des rhinites plus rares, comme les rhinites vasomotrices (nez qui coule en présence de chaud ou de froid) ou les rhinites hormonales liées à la grossesse.

 

Quels sont les signes d’accompagnement ou de gravité de la rhinite ? 

Les symptômes les plus fréquents sont l’obstruction nasale (nez bouché), la rhinorrhée (nez qui coule). Ensuite il peut y avoir des troubles de l’odorat ou des céphalées inter-orbitaires. Le trouble de l’odorat (anosmie) est le signe de gravité le plus commun, indiquant une possible atteinte des sinus. L’apparition d’une fièvre associée à des douleurs maxillo-faciales, souvent pulsatiles, doit également faire suspecter une infection plus grave, de type rhino-sinusite, nécessitant le recours à une antibiothérapie. Si l’anosmie post-rhinite infectieuse est connue depuis longtemps, dans le cas de la grippe par exemple, la fréquence de ce signe (entre 30 et 40% des cas) et sa sévérité dans la Covid-19 sont surprenantes. Heureusement, la majorité des patients récupèrent au bout de trois semaines, et les autres après trois à six mois. Le nombre d’anosmies définitives liées à la Covid19 sera probablement très faible.

 

Quelles sont les recommandations de la SFORL pour la prise en charge des rhinites ?

Concernant les rhinites infectieuses, il n’y a pas de recommandations spécifiques puisqu’elles guérissent spontanément avec un traitement local. Pour la rhinite allergique et la rhinite inflammatoire non allergique, il existe des recommandations complémentaires : un traitement de fond associant des soins locaux avec des lavages du nez une à deux fois par jour, éventuellement des vasoconstricteurs locaux en cure courte et des crèmes en cas de sécheresse sur le seuil nasal ; ainsi qu’un traitement de première intention avec les rhino-corticoïdes à diffusion locale. Pour la rhinite allergique, les antihistaminiques oraux peuvent également être proposés en première intention, à la place de la corticothérapie nasale, le choix entre lesq deux thérapeutiques peut être laissé au choix du patient. Après la période de traitement de quatre à six semaines, une évaluation de la tolérance, de l’observance et de l’efficacité est réalisée. En cas de récidive, un traitement d’entretien au long cours sera nécessaire. Les associations fixes de corticoïdes et antihistaminiques locaux permettent de faciliter l’observance de nos patients. Si l’allergène est connu, une immunothérapie spécifique pourra être prescrite en deuxième intention chez les patients souffrant d’une rhinite allergique insuffisamment contrôlée par le traitement de première intention. Cette dernière est réservée aux patients motivés et observants car la désensibilisation s’échelonne sur deux à trois ans. Enfin, dans des cas de rhinites chroniques résistantes aux traitements et en présence d’obstruction nasale, une chirurgie peut être proposée pour corriger des anomalies morphologiques.

 

Quels sont les signaux d’alerte pour le médecin généraliste ?
Il doit s’attacher au dépistage de la rhinite. En effet, 20 à 30% des patients souffrant d’une rhinite allergique ne sont ni diagnostiqués ni traités. Or ces personnes peuvent être gênées dans leurs activités professionnelles ou sportives et durant la nuit. L’interrogatoire a un rôle prépondérant. Les rhinites printanières doivent évoquer une allergie saisonnière au pollen de graminées ou de bouleaux, selon les régions, tandis qu’une allergie perannuelle, avec parfois une recrudescence automnale, doit évoquer une allergie aux acariens ou aux moisissures. Le médecin généraliste peut prescrire une antihistaminothérapie orale associée à une décontamination rhinopharyngée, en première intention. En cas d’échec, l’avis d’un spécialiste, ORL ou allergologue, est nécessaire pour affirmer le diagnostic, majorer letraitement, éduquer le patient et mettre en œuvre des tests allergologiques (tests cutanés ou dosage des IgE).

 

Le lavage du nez est-il recommandé en prévention ou traitement de la rhinite liée à la Covid-19 ?

La Covid-19 est une pathologie extrêmement récente. Les premières recommandations de la SFORL étaient donc très prudentes vis-à-vis des corticoïdes locaux et des irrigations nasales ; seuls les traitements symptomatiques antalgiques étant nécessaires. En outre, la rhinite liée à la Covid-19 n’est pas associée à des plaintes d’obstruction nasale ou de rhinorrhée, pouvant bénéficier d’un lavage des fosses nasales, mais plutôt à une sécheresse nasale avec troubles de l’odorat. Dans tous les cas, les patients traités au long cours pour une rhinite chronique ne doivent pas interrompre leurs traitements locaux en l’absence de signes infectieux.

 

Propos recueillis par Sabine Casalonga

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