• Pr. DARMON : Contrôle glycémique chez l’adulte atteint de diabète de type 2

Patrice DARMON

Discipline : Métabolisme, Diabète, Nutrition

Date : 25/04/2021


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TLM : Quel est l’objectif d’HbA1c chez les patients diabétiques de type 2 sous insuline ?
Pr Patrice Darmon :
Chez la plupart des patients diabétiques de type 2 traités par insuline, la règle est toujours de viser une HbA1c inférieure à 7%. L’objectif doit cependant être individualisé en fonction du profil clinique et biologique de chaque patient, de son âge et de ses comorbidités. Chez les patients traités par des médicaments pourvoyeurs d’hypoglycémies (insuline, sulfamides, glinides), plus on se rapproche d’une HbA1c « normale », plus le risque d’hypoglycémie augmente. Depuis 2019, la SFD préconise de fixer une borne inférieure d’HbA1c pour certaines catégories de personnes traitées par ces médicaments afin de limiter le risque d’hypoglycémie. Sont concernés : les patients présentant des comorbidités sévères ou avec une espérance de vie limitée ; les patients pour lesquels une HbA1c inférieure à 7% s’avère difficile à atteindre en raison de la survenue d’hypoglycémies lors de l’intensification ; les patients âgés fragiles, dépendants ou à la santé très altérée ; enfin, les personnes présentant une insuffisance rénale chronique sévère ou terminale. Pour tous ces patients, proposer une borne inférieure d’HbA1c limite le risque de sur-traitement : il est conseillé de ne pas descendre en dessous d’un seuil de 7%, 7,5% voire 8% selon les cas.

Comment optimiser le contrôle glycémique pour les patients sous insuline ?
Au moment de l’instauration d’une insulinothérapie basale, la SFD préco- nise de préférer un analogue lent del’insuline, et, pour des raisons économiques, de privilégier parmi eux le biosimilaire de la glargine U100. Toutefois, si le risque hypoglycémique semble préoccupant, on pourra s’orienter vers l’une ou l’autre des nouvelles insulines basales d’action très prolongée (dégludec ou glargine U300) car elles donnent un peu moins d’hypoglycémies nocturnes : pour autant, c’est un progrès sans être une révolution. Dans tous
les cas, un suivi rapproché doit être mis en place, avec un renforcement de l’auto-surveillance glycémique pour la titration des doses d’insuline et la prévention des hypoglycémies. Tout cela doit s’intégrer dans une démarche d’éducation thérapeutique visant à autonomiser au maximum le patient lorsque cela est possible. Chez les patients diabétiques de type 2 traités par insulinothérapie intensifiée (c’est-à-dire avec au moins 3 injections par jour), le dispositif de mesure continue du glucose interstitiel par méthode Flash est aujourd’hui remboursé, et son utilisation s’est largement répandue ces dernières années. Ces dispositifs nous permettent de disposer de nouveaux critères d’évaluation de l’équilibre glycémique venant compléter la mesure de l’HbA1c. Parmi eux, le temps passé dans la cible glycémique —le plus souvent 70-180 mg/dl : on estime que pour être bien équilibré, un patient devra passer plus de 70% du temps dans cette cible. Ces dispositifs de mesure continue du glucose permettent aussi par exemple de détecter des hypoglycémies nocturnes, mal ou peu ressenties, et de prendre les mesures qui s’imposent. Avec ces outils de surveillance, nous parvenons aujourd’hui à limiter le temps passé en hypoglycémie, et à adapter les schémas thérapeutiques au plus juste.

Quelles mesures peuvent prendre les praticiens pour réduire le risque d’hypoglycémie chez les patients diabétiques de type 2 sous insuline ?

Il faut d’abord identifier les patients ou les situations à risque d’hypoglycémie : par exemple âge avancé, prises alimentaires irrégulières, troubles cognitifs, insuffisance rénale chronique... ou le fait d’avoir déjà fait des hypoglycémies. Le rôle de l’éducation thérapeutique du patient et de son entourage est essentiel. L’aide d’une infirmière à domicile est parfois nécessaire, de façon transitoire ou durable. Chez les patients les plus à risque, comme on l’a vu, il faut renforcer l’éducation thérapeutique, réévaluer les objectifs glycémiques avec une borne inférieure d’HbA1c et souvent modifier le traitement (baisse des doses d’insuline, éventuellement changement d’insuline).

Quid de la pompe pour les diabétiques de type 2 sous insuline ?

uAutant la pompe à insuline est pertinente pour les patients diabétiques de type 1, notamment pour réduire le risque d’hypoglycémie, autant elle n’est réservée qu’à certaines indications dans le diabète de type 2, en particulier l’échec d’un traitement par multi-injections bien mené ou une insulino-résistance majeure avec des besoins en insuline très élevés.

Une réduction du poids est-elle indis pensable sous insuline ?

Globalement, les patients diabétiques de type 2 prennent un peu de poids lors du passage à l’insuline, même si, souvent, ils ne font que reprendre leurs kilos récemment perdus. Cela peut constituer une période privilégiée pour modifier son alimentation et augmenter son niveau d’activité physique pour tenter de limiter cette prise de poids. Cependant, chez les sujets âgés et/ou fragiles, un régime hypocalorique doit toujours être prudent et encadré médicalement car il peut être à l’origine d’une sarcopénie —voire d’une dénutrition— et induire des hypoglycémies.

Propos recueillis par Marie Beaurenaud

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