• Pr CHAUSSADE : Le rôle essentiel de la préparation colique avant une coloscopie

Stanislas CHAUSSADE

Discipline : Gastro-entérologie, Hépatologie

Date : 22/06/2020


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Les récentes recommandations mettent en évidence l’importance capitale d’une préparation de qualité avant un examen du côlon. Le Pr Stanislas Chaussade, Président de la Société Française d’Endoscopie Digestive (SFED), apporte ici son expertise pour décrypter ces nouveaux critères

TLM : La préparation colique conditionne-t-elle la qualité de la coloscopie ?

Pr Stanislas Chaussade : La qualité de la coloscopie repose sur un tout. Les dernières recommandations du groupe de travail sur ce sujet, publiées en 2019, dégagent sept critères majeurs à prendre en compte pour s’assurer de cette qualité. Ils portent sur la pré-procédure, le caractère complet de la procédure, l’identification de la pathologie, sa prise en charge, les complications de la coloscopie, le ressenti du patient et le post-procédure. Le premier de ces critères majeurs inclut la préparation qui conditionne la qualité de l’acte, et donc son succès. Rappelons qu’une préparation colique incorrecte est associé à un taux de détection d’adénomes plus bas et à un taux de coloscopies incomplètes plus élevés.

TLM : Comment déterminez-vous la qualité de cette préparation ?

Pr Stanislas Chaussade : Nous recommandons d’évaluer la qualité de préparation par un score validé, habituellement le score de Boston. Il permet une évaluation de la préparation du côlon, segment par segment. Le groupe de travail français considère qu’un score supérieur ou égal à 7 devrait être exigé pour un examen de qualité, sans aucun segment coté 1.

 

TLM : Quels sont les critères d’efficacité d’une préparation colique ?

Pr Stanislas Chaussade : La préparation doit être efficace, bien tolérée et bien acceptée par le patient, en termes de volume et de palatabilité. Une préparation fractionnée a démontré sa supériorité en termes d’efficacité et de tolérance de la préparation colique vis-à-vis d’une préparation en prise unique. Il ne faut toutefois pas oublier les règles de base de la physiologie intestinale. 8 à 10 litres d’eau circulent dans le tube digestif. Si la préparation n’apporte pas assez d’eau ou d’électrolytes, le risque d’impact sur la volémie augmente, pouvant conduire à un phénomène de déshydratation et d’hyponatrémie ou d’hypokalièmie en particulier chez les sujets âgés en institution. Il faut aussi rappeler qu’un délai de trois heures entre la dernière prise de préparation et l’induction anesthésique paraît raisonnable pour garantir l’absence de risque d’inhalation chez les patients ne présentant pas de ralentissement de la vidange gastrique.

TLM : Quel type de préparation colique préconisez-vous chez les sujets fragiles (insuffisants cardiaques, rénaux, sujets âgés) ?

Pr Stanislas Chaussade : La coloscopie est un examen qui peut présenter des risques, qui augmentent avec l’âge et certaines comorbidités. Le risque varie aussi selon les spécialités. Il est donc nécessaire de sélectionner la préparation la mieux tolérée chez ce type de patient. Chez les patients insuffisants cardiaques ou insuffisants rénaux il est recommandé d’utiliser des préparation à base de PEG.

TLM : Ces bonnes pratiques sont-elles bien intégrées dans l’exercice quotidien des gastro-entérologues ?

Pr Stanislas Chaussade : Le travail des société savantes et plus particulièrement de la SFED font que ces bonnes pratiques sont aujourd’hui reconnues comme une nécessité. La commission qualité de la SFED œuvre en ce sens de longue date et contribue ainsi à une réelle mobilisation de la profession dans une démarche qualité. L’augmentation du taux de détection des adénomes est, au moins en partie, dû à l’amélioration de la qualité de la préparation mais aussi à celle de l’acte réalisé par l’endoscopiste et à l’amélioration de la qualité des appareils.

TLM : Quel est le rôle du médecin généraliste dans le parcours patient lié à la coloscopie ?

Pr Stanislas Chaussade : Si l’acte est du ressort exclusif du spécialiste, le généraliste joue un rôle déterminant dans la surveillance et l’orientation des patients qu’il suit. Il doit ainsi se montrer particulièrement attentif aux patients à risque élevé de cancer colorectal et plus particulièrement ceux ayant un antécédent personnel ou au premier degré d’adénome ou de cancer colorectal ainsi que ceux présentant une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. Ces patients doivent bénéficier en 1e intention d’une coloscopie  et non rentrer dans le cadre de la campagne de dépistage du CCR par la recherche de sang dans les selles (Test FIT). Son rôle est alors de motiver le patient à bénéficier d’une coloscopie et le réorienter vers un spécialiste. Il en est de même pour les patients présentant des symptômes digestifs.

 

■ Propos recueillis par Laurent Tiphaine 

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