• Jean-Noël Perin : L’oligothérapie, l’autre voie pour les pathologies hivernales

Jean-Noël Perin

Discipline : Infectiologie

Date : 23/10/2023


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Selon le Dr Jean-Noël Perin, pharmacien responsable des laboratoires Granions, pour prévenir et traiter les infections de l’hiver et « corriger lescarences », il préconise, selon les cas, des cures de cuivre, de bismuth, d’argent, aux effets antiinfectieux, anti-inflammatoires et qui stimulent les défenses immunitaires.

 

TLM : Sur quels principes repose l’oligothérapie ?

Jean-Noël Perin : Les oligoéléments sont des micronutriments non synthétisés par l’organisme et apportés en très faible quantité par l’alimentation. L’apport exogène est donc indispensable à la vie. Ces oligoéléments ont de nombreuses fonctions et propriétés. Ils sont impliqués dans la structure des cellules, des tissus, dans la construction des vitamines. Ils ont également un rôle de catalyseur dans des réactions enzymatiques et dans les défenses de l’organisme.

Pour que certaines enzymes soient fonctionnelles, les oligoéléments sont indispensables. Certains oligoéléments sont dits essentiels, le cuivre, le zinc, le sélénium, le manganèse, le chrome, l’iode, le magnésium et le potassium. Leur rôle physiologique est très important et ils sont présents en quantité constante dans les tissus et organes. Par exemple, le magnésium est impliqué dans la production de l’ATP (adénosine-triphosphate), c’est-à-dire de l’énergie. Si l’on manque de magnésium, on manque d’énergie, on est fatigué. La carence en oligoéléments essentiels rend aussi plus susceptible aux infections, à la fatigue, altère le teint, les ongles et les cheveux. Cette carence est responsable de pathologies fonctionnelles (sans composante lésionnelle) comme la fatigue chronique, les maux de têtes, les vertiges, ou les troubles du rythme cardiaque.

Les patients ne se sentent pas en forme, mais n’ont pas de lésions ou d’anomalies biologiques. Il existe également des oligoéléments non essentiels, l’argent, l’or, le bismuth, le lithium, qui ont des effets pharmacologiques notables, mais ne sont pas apportés naturellement par l’alimentation. On peut retrouver des traces de lithium dans certaines eaux du robinet et minérales, des études récentes ont montré un lien positif entre la consommation de ces eaux et la santé mentale des populations exposées.

 

TLM : Quelles sont les sources naturelles d’oligoéléments ?

Jean-Noël Perin : Ces oligoéléments se trouvent dans le sol, rentrent dans la chaîne alimentaire par le biais des végétaux, mais aussi des élevages d’ovins, de bovins… La carence en oligoéléments est la conséquence de plusieurs facteurs liés à notre mode de vie. Par exemple, le fait de faire cuire longtemps les aliments réduit leur concentration en oligoéléments. L’agriculture intensive diminue également leur concentration dans les végétaux.

Le mode de vie sédentaire, la consommation d’alcool, de tabac, perturbent leur métabolisme. Le fait d’avoir des apports insuffisants, un mode de vie stressant, une consommation de tabac et d’alcool, majore le risque de carence en oligoéléments et vitamines. L’oligothérapie fait partie de la micronutrition. Elle vise à redonner à l’organisme les oligoéléments indispensables à son bon fonctionnement. Le sélénium, le cuivre et le zinc jouent un rôle essentiel dans les défenses de l’organisme et pour lutter contre le stress oxydatif et participent à la synthèse de certaines hormones, notamment thyroïdiennes.

 

TLM : Quel est le rôle de l’oligothérapie dans la prévention des infections de l’hiver ?

Jean-Noël Perin : L’oligothérapie est une médecine fonctionnelle, qui en corrigeant les carences d’apport ou d’utilisation, rééquilibre un terrain qui était favorable au développement des infections. Cette médecine repose sur l’apport d’oligoéléments en petites quantités sur une plus ou moins longue durée. Elle peut parfois compléter un traitement médical avec peu de risques d’interaction. Certains oligoéléments stimulent les défenses immunitaires et permettent de prévenir, traiter un épisode infectieux et même favoriser la récupération post-infection. Prenons le cuivre : il est connu depuis la nuit des temps pour ses propriétés anti-infectieuses contre les virus et les bactéries. Il est possible de l’utiliser en prévention, par exemple au mois de septembre avec une cure trois mois, pour se prémunir contre les infections virales. Le cuivre peut aussi être un traitement d’attaque en cas d’infection, pour stimuler l’immunité et les défenses naturelles.

Ainsi, utilisé dès les premiers signes d’une infection virale, le cuivre permet de raccourcir la durée des symptômes. Il a trois actions principales : un effet anti-infectieux direct ; il est capable de détruire les cellules infectées et stimule l’immunité, par le biais des lymphocytes T et des lymphocytes B ; enfin, il présente un effet anti-inflammatoire en inhibant la synthèse d’une cytokine pro-inflammatoire, l’interleukine 1.

 

TLM : Quels autres oligoéléments peut-on prescrire contre les infections hivernales ?

Jean-Noël Perin : Le bismuth est un autre oligoélément très utile contre les maux de l’hiver.

Il a à la fois un effet anti-inflammatoire et antiseptique, très rapide. De surcroît, il est éliminé par les glandes salivaires, ce qui explique son action sur les maux de gorge. Il se prend en traitement de courte durée pendant 5 à 10 jours, lors d’un épisode de mal de gorge ou de rhume. Autre oligoélément trèsimportant dansl’arsenal anti-infectieux, l’argent, utilisé depuisl’Antiquité pour son activité antivirale et bactéricide puissante. Il inhibe la réplication des bactéries et des virus, possède des propriétés anti-inflammatoires et analgésiques, efficaces contre les douleurs aiguës ou chroniques de la sphère ORL.

 

TLM : Et comment bien récupérer après un épisode infectieux ?

Jean-Noël Perin : Pour se remettre d’un épisode infectieux l’hiver, l’association cuivre/or/argent, est très utile. Le principe est de se traiter pendant un à trois mois, après une infection pour éviter les récidives et retrouver la forme. L’or catalyse l’effet du cuivre. Et stimule la production de cortisol et de noradrénaline. Ce trio d’oligoéléments exerce un effet à la fois psychostimulant et antiasthénique. Le soufre est utilisé en ORL, contre les bronchites et les sinusites car il permet de fluidifier les secrétions. Le sélénium, outre son action antioxydante participe à la stimulation du système immunitaire, comme le zinc d’ailleurs. Des essais cliniques pendant la pandémie de Covid ont montré l’importance du zinc et du sélénium pour réduire le risque de forme grave de la maladie.

 

TLM : Les médecins sont-ils formés à l’oligothérapie ?

Jean-Noël Perin : Les médecins connaissent mal l’oligothérapie, alors que des essais cliniques ont démontré son efficacité et sa bonne tolérance, et cela avec un recul de plus de 70 ans. Ils doivent pourtant savoir que cette oligothérapie peut être une thérapeutique à part entière, notamment contre les infections virales de l’hiver, mais aussi un complément thérapeutique, dans certains cas, en association avec des prises en charge médicales classiques.

Propos recueillis

par le Dr Martine Raynal

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