Motifs fréquents de consultations, le stress et les troubles du sommeil nécessitent une consultation longue et approfondie pour offrir aux patients une prise en charge adaptée et efficace, estime le Dr Sabine Ferrer, médecin généraliste à Grandieu. Médecin à exercice particulier (MEP), elle plébiscite le recours aux médecines alternatives.

TLM : Confirmez-vous que le stress et les troubles du sommeil sont un motif fréquent de consultation en médecine générale ?

Dr Sabine Ferrer : Malheureusement, oui. Et lorsque le stress n’a pas directement motivé la consultation, on découvre très souvent à l’examen qu’il est à l’origine des symptômes qui ont conduit le patient chez son médecin.

TLM : Observez-vous des profils de patients plus concernés que d’autres ?

Dr Sabine Ferrer : Concernant le stress, mon expérience montre que tout le monde peut être concerné à un moment ou à un autre de sa vie et avoir besoin de consulter, quels que soient l’âge et le sexe. Les causes et les manifestations de ce stress ne sont en revanche pas forcément les mêmes chez un enfant, un adulte ou une personne âgée. Les troubles du sommeil ont tendance à affecter, quant à eux, davantage les adultes après 40 ans.

TLM : Quelles sont les causes de stress invoquées par les patients ?

Dr Sabine Ferrer : Le travail, et plus particulièrement les relations professionnelles —avec le patron, les collègues, employés, clients… Globalement, je constate que le « vivre ensemble », au travail donc mais aussi au sein de la famille et de la société devient difficile et source de stress et de tensions parmi nos concitoyens. Ce n’est pas toujours la raison invoquée par les patients dans les premières minutes de la consultation, mais ces difficultés relationnelles apparaissent dès lors que le médecin prend le temps de comprendre l’origine de ce stress.

TLM : Sous quelles formes se manifeste-t-il ?

Dr Sabine Ferrer : Le plus souvent par des troubles digestifs : douleurs gastriques, ballonnements, nausées voire vomissements. Le ventre — le bien nommé « deuxième cerveau »— parle très vite lorsqu’il est soumis à un stress. Ce dernier peut également se manifester sous forme de fatigue, de mal-être, de tensions musculaires et de troubles musculosquelettiques. Les troubles du sommeil en sont également une manifestation fréquente, mais les deux ne sont pas forcément liés : s’il est vrai que les personnes stressées ont souvent du mal à bien dormir, l’inverse n’est pas nécessairement vrai ; en effet, il existe de multiples raisons aux troubles du sommeil comme l’usage abusif des benzodiazépines, la douleur, le vieillissement… Chez les personnes âgées, les symptômes sont moins évidents à repérer et plus difficiles à attribuer au seul stress.

TLM : Concernant les troubles du sommeil, certains sont-ils plus fréquents que d’autres ?

Dr Sabine Ferrer : On observe toute la palette des troubles du sommeil : difficultés d’endormissement, insomnies suivies d’un sommeil au petit matin, réveils nocturnes fréquents entraînant un sommeil haché… Il n’y a pas un type de trouble du sommeil dont la prévalence le distingue des autres.

TLM : Comment se déroule une consultation pour ce type de problème ?

Dr Sabine Ferrer : Il faut prendre le temps d’interroger le patient pour comprendre ce qui se cache derrière les symptômes qui ont motivé sa consultation. C’est la seule façon de procéder si on veut vraiment l’aider. Car la solution n’est pas nécessairement médicamenteuse. D’ailleurs, très souvent, la seule écoute attentive procure un mieux-être. Ce sont des consultations longues, qui mériteraient d’être revalorisées, d’autant qu’elles sont indispensables si l’on veut prévenir une aggravation vers une dépression ou un burnout et, plus globalement, un mal de vivre, dont on constate, du moins au sein des cabinets médicaux, que la prévalence est en forte croissance depuis plusieurs années, même avant le Covid.

TLM : Si la solution n’est pas toujours médicamenteuse, quels sont vos outils pour prendre en charge vos patients ?

Dr Sabine Ferrer : Je suis médecin généraliste à exercice particulier (MEP), car formée à des médecines alternatives comme l’homéopathie, la phytothérapie, l’aromathérapie ou encore l’acupuncture. Cela me permet de disposer d’un éventail relativement large d’outils thérapeutiques pour proposer une prise en charge sur mesure, adaptée à mes patients. En général, je recours d’abord à l’oligothérapie, qui vise avant tout à rééquilibrer un organisme dans sa totalité et à améliorer son fonctionnement général dans sa globalité. Disponibles sous formes de solutions buvables en ampoules ou en flacons et comprimés sublinguaux pour en faciliter la prise, les oligoéléments agissent principalement au niveau des enzymes et peuvent parfois interagir au niveau des canaux intracellulaires avec d’autres oligoéléments par mimétisme expliquant ainsi leur mode d’action. A dosage plus élevé, l’oligothérapie permet dans certaines situations de compenser une carence avérée mais aussi de modifier le terrain des patients dans le cas de pathologies fonctionnelles.

Les oligoéléments intéressants pour traiter le stress et les troubles du sommeil sont le magnésium et le lithium. Généralement, un mois de traitement suffit mais tout dépend de la sévérité des troubles. L’oligothérapie présente également un intérêt en relais des anxiolytiques, antidépresseurs et somnifères. Contrairement à ces derniers, ils n’entraînent pas de phénomène de sevrage. La phytothérapie, avec la passiflore, l’aubépine et la valériane, ou encore l’aromathérapie, avec les huiles essentielles de lavande, d’ylangylang ou de petit grain bigarade fonctionnent bien également. Quant à l’homéopathie, le traitement se fait au cas par cas, selon la cause du stress ou du trouble du sommeil, l’humeur associée… Quelle que soit la thérapie proposée au patient, celui-ci doit rapidement sentir ses bienfaits ; si rien ne se passe après une semaine de traitement, il faudra revoir celui-ci.

TLM : Est-ce à dire que l’allopathie n’a pas sa place dans le traitement du stress et des troubles du sommeil ?

Dr Sabine Ferrer : Non, bien évidemment, elle peut même être utilisée d’emblée lorsque cela s’avère nécessaire. Mais je suis favorable à une graduation des traitements, en commençant par ceux qui occasionnent le moins d’effets indésirables et engendrent la moindre dépendance. On peut déplorer que l’oligothérapie soit peu connue des praticiens, alors qu’il s’agit d’une approche efficace, non toxique et écologique ! Il ne faut pas oublier non plus les alternatives aux traitements médicamenteux que sont la sophrologie, l’hypnose ou l’acupuncture, qui donnent également de très bons résultats.

Propos recueillis

par Jeanne Labrune ■