• Dr Romain Forestier : Les cures thermales et leurs effets bénéfiques sur l’arthrose

Romain Forestier

Discipline : Rhumato, Orthopédie, Rééduc

Date : 13/10/2022


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Depuis une vingtaine d’années, les cures thermales rencontrent un engouement croissant de la part des patients souffrant d’arthrose, pathologie devenue la première indication pour le thermalisme.

Le Dr Romain Forestier, rhumatologue à Aix-les-Bains, décrypte les raisons de cette ferveur.

 

Loin derrière l’Allemagne et ses 2 millions de cures annuelles, de l’Italie (1,5 million) ou de la Hongrie (1,2 million), qui occupent les trois marches du podium européen, la France et sa centaine de stations thermales attirent tout de même chaque année entre 500 000 à 600 000 curistes. Âgés de 66 ans en moyenne, ils sont de plus en plus nombreux à rechercher les bienfaits reconnus du thermalisme sur les douleurs d’origine rhumatismale. « En rhumatologie, les cures thermales présentent un intérêt dans toutes les affections articulaires chroniques : arthrose (rachis, genoux, hanche, main), douleurs vertébrales chroniques (lombalgies, cervicalgies, dorsalgies), sciatiques, cruralgies et névralgies cervico-brachiales. La fibromyalgie, tout comme les troubles musculosquelettiques chroniques (TMS) liés à des tendinopathies ou à des tendinobursopathies chroniques font également partie de leurs indications. Enfin, elles peuvent être proposées dans la prise en charge des personnes souffrant de rhumatismes inflammatoires stabilisés comme la polyarthrite rhumatoïde, la spondylarthrite ankylosante ou les rhumatismes psoriasiques, mais leur efficacité est dans ces derniers cas plus discutée », précise le Dr Romain Forestier, rhumatologue à Aix-les-Bains.

La rhumatologie, principale indication des cures thermales. Depuis une vingtaine d’années, la rhumatologie est d’ailleurs devenue la principale spécialité motivant un séjour dans un établissement thermal : plus de 80 % des curistes y sont adressés pour des douleurs rhumatismales, contre seulement la moitié au milieu des années 1980. « Cette progression s’explique par le fait que les établissements thermaux ont financé de nombreuses études sur les bienfaits du thermalisme dans les pathologies rhumatismales, indique le Dr Forestier. Les résultats publiés dans les revues de rhumatologie ont achevé de crédibiliser cette approche thérapeutique auprès des prescripteurs et de l’Assurance maladie et, ce faisant, de préserver sa prise en charge. » On rappelle en effet que, pour être remboursées par l’Assurance maladie, les cures thermales doivent être prescrites par un médecin. Lors de sa demande, le praticien doit indiquer les stations thermales dans lesquelles il envisage d’envoyer son patient. La réponse de la Sécurité sociale est généralement donnée dans un délai d’un mois, après qu’elle s’est assurée que ces stations ont effectivement une indication rhumatologique. « Une fois que la Sécu a donné son accord, c’est au patient de prendre contact avec l’établissement thermal de son choix », précise le rhumatologue. La cure dure trois semaines ; l’Assurance maladie prend en charge l’intégralité des soins, à raison d’une cure par an.

Soins généraux et soins locaux.

Dans les cures thermales de l’arthrose, les soins combinent soins généraux — massages pour détendre les muscles, assouplir les tissus et les articulations ; douches et jets sous-marins pour leur action antalgique ; cataplasmes de boue chaude ; bains chauds à base de vapeur ; mobilisations en piscine— et soins locaux appliqués sur la zone douloureuse. Les patients sont reçus en début de séjour par le médecin thermal pour une personnalisation de leur cure, puis à mi-parcours pour adapter les soins, si nécessaire. À quoi tiennent les effets bénéfiques des cures thermales ?

« Plus qu’à la composition de l’eau, ils sont étroitement liés aux soins prodigués et à la chaleur, qui procure un effet décontracturant et myorelaxant et qui diminue le seuil d’excitabilité des récepteurs de la douleur. Traditionnellement, les patients souffrant d’arthrose étaient dirigés vers les cures thermales utilisant des eaux soufrées, mais on s’est aperçu que les eaux bicarbonatées ou salées procuraient les mêmes bienfaits », indique Romain Forestier. Et ce dernier d’ajouter : « Les mouvements en piscine sont le soin pour lequel il existe le plus grand niveau de preuve en matière de soulagement des douleurs liées à l’arthrose. Et il apparaît que le fait d’être en groupe est plus bénéfique que seul », souligne le rhumatologue. Généralement, les bienfaits perdurent jusqu’à cinq à six mois après la cure.

De multiples bénéfices. Mais l’intérêt des cures thermales de l’arthrose ne s’arrête pas là ; en soulageant efficacement les patients, qui se sentent plus souples et plus détendus, elles leur permettent de réduire leur consommation d’antalgiques et d’anti-inflammatoires et d’être ainsi moins exposés à leurs effets indésirables (somnolence, nausées, constipation...) et au risque d’accoutumance. « Dans l’arthrose, les cures thermales peuvent tout à fait remplacer ces médicaments durant la phase chronique », assure le Dr Forestier —ce qui n’est, en revanche, pas le cas chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ou de spondylarthrite ankylosante, qui doivent poursuivre leur traitement médicamenteux pendant leur cure. Enfin, ces séjours sont aussi parfois l’occasion pour les patients de retrouver confiance en eux et de reprendre des activités, et d’être plus à l’écoute des conseils hygiéno-diététiques de leur médecin.

Propos recueillis

par Amélie Pelletier

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