• Dr Oliveres-Ghouti : Contagieuse et handicapante, la gale n’est pas une maladie honteuse…

Catherine Oliveres-Ghouti

Discipline : Dermatologie

Date : 17/01/2023


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Dr Oliveres-Ghouti : Contagieuse et handicapante, la gale n’est pas une maladie honteuse…

Générée par le sarcopte, un parasite, la gale constitue l’une des 6 000 maladies dermatologiques. Souvent perçue comme une pathologie honteuse par les patients, elle toucherait 200 000 patients par an en France. Le diagnostic est fondé sur un interrogatoire et un examen pertinents. Les explications du Dr Catherine Oliveres-Ghouti, dermatologue et trésorière du Syndicat national des dermatologues.

 

TLM : Comment définir la gale ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : La gale est une maladie parasitaire de la peau due à un minuscule acarien, le sarcopte. Après contamination par une personne infectée, les acariens se développent en creusant des sillons dans la peau. Le patient souffre alors de démangeaisons intenses, principalement la nuit, car c’est le moment durant lequel la femelle sarcopte pond ses œufs.

Il faut environ huit jours pour que ces œufs sarcoptes deviennent adultes, ce qui justifie la nécessité d’un second traitement dix jours après le premier.

 

TLM : Comment se transmet cette pathologie ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : La gale est une maladie fréquente, très contagieuse, et qui touche des personnes de tout âge et de tout milieu socio-économique. Contrairement à certaines idées reçues, elle ne touche pas particulièrement les personnes qui ont une mauvaise hygiène. Si votre amant énarque réside dans les beaux quartiers, il vous contaminera à coup sûr s’il est lui-même infecté. En effet, la gale se transmet essentiellement par contact physique direct, peau contre peau, le plus souvent lors de rapports sexuels, mais aussi dans le cadre des contacts entre proches ou, dans environ 10 % des cas, par le biais de literies non nettoyées, notamment des duvets partagés. Mon ancien chef de service avait pour habitude de dire que, en règle générale, « la gale s’attrape dans les bras, pas dans les draps ». Personnellement, j’ai serré la main à des milliers de patients contaminés par la gale et je ne l’ai jamais attrapée.

 

TLM : Comment s’effectue le diagnostic de la gale ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : Le sarcopte mesurant moins d’un demi-millimètre, il n’est pas visible à l’œil nu. Le diagnostic repose donc essentiellement sur un interrogatoire adapté. Il est notamment essentiel de ne pas induire les réponses dans les questions. Il convient donc de demander à quel moment de la journée le patient se gratte, quelles sont les zones de démangeaisons et si d’autres personnes de son entourage se grattent aussi. La gale engendre typiquement des démangeaisons nocturnes, essentiellement sur la poitrine, les fesses, les aisselles et la face intérieure des cuisses. La gale ne donne pas de boutons, mais des sillons sont parfois perceptibles. Le dermatologue peut utiliser un dermascope, avec un grossissement de 15 pour étayer son diagnostic, mais, chez le médecin généraliste, un interrogatoire bien construit suffit. Il faut écouter le patient. Mieux vaut faire preuve de diplomatie et de bon sens, car le patient peut cacher certains éléments… Notamment lorsqu’il est interrogé devant son conjoint ou ses parents !

 

TLM : Quels sont les moyens de prévention contre la gale ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : Il est difficile de se prémunir totalement de la gale, à moins de vivre sans contacts rapprochés. En revanche, il est possible de limiter les risques, en évitant de partager des duvets ou de s’allonger sur des couvre-lits dans les hôtels, car, contrairement aux draps, ils ne sont pas lavés entre deux clients.

 

TLM : En cas d’absence de traitement, quels sont les risques de complication ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : En cas d’absence de traitement, le patient risque surtout de se gratter encore et encore, notamment la nuit, ce qui impacte fortement la qualité du sommeil. Dans certains cas, le patient peut développer des nodules scabieux, principalement sous les aisselles et au niveau des organes génitaux, qui persistent parfois même après le traitement.

 

TLM : Le médecin généraliste constitue-t-il un maillon essentiel dans la prise en charge de la gale ?

Dr Catherine Oliveres-Ghouti : Tout à fait. Lorsqu’un patient a la gale, il est important d’être réactif.

Pour lui, mais aussi pour son entourage, afin d’éviter qu’il ne contamine plusieurs personnes, qui, à leur tour, apporteront la maladie à leurs proches.

Une réactivité totalement incompatible avec les mois de délai pour obtenir un rendez-vous chez un dermatologue. Les médecins généralistes bénéficient de toutes les compétences pour poser le diagnostic et mettre en place un traitement adapté.

Propos recueillis

par Solène Penhoat

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