• Dr MAJOULET : Le vrai du faux sur la contraception par le stérilet au cuivre

Laurène MAJOULET

Discipline : Gynécologie, Santé de la Femme

Date : 11/04/2022


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Délaissé par leurs aînées qui lui préfèrent la version hormonale, le dispositif intra-utérin au cuivre connaît une seconde jeunesse auprès des jeunes femmes adeptes du « sans hormones ». Il reste néanmoins victime d’idées reçues, disséquées ici par le Dr Laurène Majoulet, gynécologue à Paris.

 

TLM : Sur quel mécanisme d’action repose le dispositif intra-utérin (DIU) au cuivre ?

Dr Laurène Majoulet : Ce type de DIU est inséré dans la cavité utérine et assure une contraception à long terme réversible. Le mode d’action principal du DIU au cuivre est un effet spermicide du cuivre sur les gamètes à l’origine d’une altération des spermatozoïdes, entraînant ainsi une inhibition de la fécondation. Le DIU agit également en provoquant une inflammation locale de l’endomètre qui empêche l’implantation dans l’utérus de l’ovocyte fécondé.

 

TLM : Les nullipares peuvent-elles se faire poser un DIU au cuivre ?

Dr Laurène Majoulet : Oui, depuis 2004, les DIU sont indiqués chez les femmes qui n’ont jamais eu d’enfant. Il en existe deux tailles, dont l’une plus petite est adaptée aux utérus plus courts. Et, depuis 2016, la Haute Autorité de santé précise que ce mode de contraception doit être proposé à toutes les femmes, même aux plus jeunes et/ou à celles qui n’ont jamais eu d’enfant, dès lors que les contre-indications à la pose, les risques infectieux, le risque de grossesse extra-utérine et les situations à risque ont été écartés.

 

TLM : Le DIU au cuivre augmente-t-il le risque d’infections ?

Dr Laurène Majoulet : Un dispositif intra-utérin, qu’il soit hormonal ou au cuivre, reste un corps étranger dans l’organisme. Le vagin dans lequel il est placé est un milieu stérile, mais son introduction via le col de l’utérus et la sortie des fils à travers ce même col l’exposent, potentiellement, au contact des bactéries du vagin. Par conséquent, choisir un stérilet comme mode de contraception expose effectivement à un risque plus élevé d’infections sexuellement transmissibles, mais ce risque ne constitue en aucun cas une contre-indication. En outre, cet argument avancé par certains professionnels de santé pour ne pas proposer un DIU à des jeunes femmes repose sur l’idée qu’elles ont une vie sexuelle plus active que des femmes plus âgées...

C’est un préjugé infondé qui n’est plus audible ! Le DIU au cuivre est un mode de contraception, et comme tout mode de contraception, il doit s’accompagner de mesures de protection lors des rapports sexuels.

 

TLM : On a également entendu dire que le DIU au cuivre augmentait le risque de grossesse extra-utérine...

Dr Laurène Majoulet : Cette idée repose sur des études épidémiologiques qui montrent, en effet, que ce mode de contraception est plus fréquent chez les femmes qui ont eu une grossesse extra-utérine. Contrairement à la pilule qui empêche l’ovulation, le stérilet au cuivre n’empêche pas, stricto sensu, une grossesse extra-utérine. Néanmoins, ce risque reste très faible.

 

TLM : Qu’en est-il de son efficacité ?

Dr Laurène Majoulet : Le dispositif intra-utérin au cuivre est un mode de contraception particulièrement efficace. Avec un indice de PEARL égal à 0,2 (ce qui correspond à une grossesse chez 0,2 % des femmes qui ont un stérilet au cuivre), son efficacité théorique est semblable à celle d’une contraception orale ; mais contrairement à cette dernière, dont les nombreux oublis font baisser son efficacité pratique, celle du DIU au cuivre reste égale à son efficacité théorique.

 

TLM : Est-il vrai que le DIU au cuivre provoque des règles plus abondantes et plus douloureuses ?

Dr Laurène Majoulet : Les saignements durent effectivement plus longtemps et peuvent parfois être plus douloureux. Ceci est lié au mécanisme inflammatoire sur lequel repose ce mode de contraception. Ce n’est toutefois pas systématique et, généralement, cela se régule avec le temps, dans les trois ou quatre mois qui suivent la pose du stérilet. Il est important d’expliquer aux femmes que la contraception est un compromis et que chaque méthode comporte ses avantages et ses inconvénients, à considérer au regard de son mode de vie, de sa sexualité, de son âge... Certaines sont prêtes à supporter une légère augmentation du flux menstruel pour éviter d’exposer leur organisme aux hormones : dans ce cas, il faut les informer du risque important de carence en fer, les surveiller attentivement et les supplémenter si besoin.

 

TLM : Est-ce un geste douloureux ?

Dr Laurène Majoulet : La pose d’un dispositif intra-utérin n’est pas un moment très agréable ! Cela peut être un peu douloureux, surtout chez une femme qui n’a jamais eu d’enfant. C’est pourquoi je préconise des antalgiques en prémédication.

 

TLM : Selon Santé publique France, les ventes de DIU au cuivre ont doublé en 10 ans. Avez-vous constaté une hausse de la demande dans votre patientèle ?

Dr Laurène Majoulet : Oui, et plus particulièrement parmi les jeunes femmes. Contrairement aux quadragénaires qui préfèrent des DIU hormonaux pour ne plus avoir de saignements, les jeunes générations ne veulent pas exposer leur corps aux hormones, elles veulent ressentir les effets de leur cycle et continuer à avoir leurs règles chaque mois, sans pour autant subir la charge mentale liée à la contraception. Le DIU au cuivre répond parfaitement à leurs attentes.

 

TLM : Que dites-vous à vos consœurs et confrères généralistes ?

Dr Laurène Majoulet : Le DIU au cuivre est un mode de contraception sûr et efficace, plus fiable que la pilule, qui convient par conséquent parfaitement aux jeunes femmes. En outre, l’âge et le tabac ne sont pas des contre-indications. Facile à prescrire, il est peu coûteux et répond à une demande en hausse de la part des femmes à laquelle il importe de répondre. Il faut néanmoins mettre en garde les adeptes des coupes — ou cup — menstruelles, très prisées des femmes qui prônent le naturel et qui sont souvent les mêmes qui refusent les hormones, de leur incompatibilité avec le DIU au cuivre : délicates, les manœuvres de retrait de ces protections périodiques peuvent, en effet, faire bouger le DIU et le rendre inefficace.

Propos recueillis

par Charlotte Montaret

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