L’intérêt des cures thermales dans la prise en charge de l’eczéma et du psoriasis n’est plus à démontrer, estime le Dr Laurentiu Gologan, médecin thermal à Avène. Il encourage médecins généralistes et dermatologues à les proposer davantage à leurs patients.

TLM : L’eczéma et le psoriasis sont-ils un motif courant de cure thermale ?

Dr Laurentiu Gologan : Dans les stations thermales dont l’eau de source possède des propriétés anti-inflammatoires, anti-irritantes et apaisantes sur les peaux atopiques et psoriasiques, on peut aussi prendre en charge d’autres maladies inflammatoires et prurigineuses de la peau (comme le lichen plan chronique, les prurigos). Mais il est vrai que l’eczéma et le psoriasis représentent les deux principaux motifs de consultation.

TLM : Quel est le profil des curistes dans les établissements thermaux proposant des soins pour ces deux dermatoses ?

Dr Laurentiu Gologan : Les curistes atteints d’eczéma atopique sont souvent jeunes, cette maladie s’exprimant généralement pendant l’enfance (entre quelques mois et 8 -10 ans environ). Mais on accueille aussi des adultes dont la maladie est apparue ou réapparue à l’âge adulte, ou des adultes ayant développé un eczéma de contact, par exemple après une exposition ou du fait de leur mode de vie. Ce sont, en revanche, des adultes qui viennent traiter leur psoriasis.

TLM : Lequel, du patient ou du médecin, est le plus souvent à l’initiative de la cure ?

Dr Laurentiu Gologan : L’idée peut venir des patients après qu’ils ont vu ou lu des reportages dans les médias, mais le plus souvent ils sont envoyés par leur médecin. Pourtant, en France, peu de praticiens ont une connaissance suffisante des bienfaits des soins thermaux sur l’eczéma et le psoriasis pour les proposer à leurs patients.

TLM : Quels sont ces bienfaits ?

Dr Laurentiu Gologan : L’eczéma et le psoriasis sont deux maladies de peau qui altèrent considérablement la qualité de vie des patients. Beaucoup sont fatigués de devoir appliquer sans arrêt des crèmes et prendre des traitements parfois lourds comme le méthotrexate ou la cyclosporine : ils veulent essayer une autre approche, plus douce. La cure thermale répond parfaitement à leurs attentes. Les curistes remarquent généralement après les soins thermaux moins de sécheresse de la peau, moins d’inflammation et de démangeaisons. Dans notre expérience, les curistes observent encore une amélioration de leur état cutané quatre à six mois après leur cure thermale. Bien sûr, les patients devront continuer leur traitement tel que prescrit par leur dermatologue. Cela ne signifie pas non plus qu’ils n’auront plus de poussées, mais ils auront généralement des poussées moins nombreuses et moins graves.

TLM : Des études scientifiques ont-elles été menées pour démontrer l’intérêt du thermalisme dans ces dermatoses ?

Dr Laurentiu Gologan : L’Association française pour la recherche thermale a diligenté une étude, PSOTHERMES, pour évaluer l’intérêt de la cure thermale dans la prise en charge du psoriasis en plaques. Menée dans cinq établissements thermaux français auprès de 126 patients comparés à un groupe contrôle, elle met en évidence l’amélioration des symptômes, de l’image de soi et de la qualité de vie des curistes, à court et à long terme. Par ailleurs, l’étude observationnelle réalisée à la station thermale d’Avène entre 2001 et 2009 auprès de 6 000 curistes (dont 4 800 atteints de psoriasis) atteste d’une baisse de la sévérité de l’atteinte après les soins thermaux. Le ressenti des curistes confirme ces données : à la fin d’une cure thermale, leur peau présente moins de rougeurs, moins de squames, ils dorment mieux car il y a une réduction des démangeaisons, et ils observent une réduction de la dose de crèmes corticoïdes nécessaires.

TLM : En quoi consistent les soins ?

Dr Laurentiu Gologan : Les curistes suivent quatre soins par jour pendant les trois semaines de leur cure. Les soins sont choisis par le médecin thermal lors de la consultation d’arrivée des patients, en fonction de leur pathologie, de l’état de leur peau, des symptômes qui les gênent le plus, etc.

Parmi les soins proposés généralement dans les stations thermales qui proposent des cures eczéma et psoriasis, on retrouve des bains simples ou hydromassants (avec jets et bulles) à l’eau thermale, des douches filiformes, des pulvérisations générales ou localisées aux mains, au visage ou au cuir chevelu, l’application de compresses ou, le soin préféré des curistes, des massages sous l’eau. On évite les jets et les douches filiformes pour les patients dont la peau présente un état d’inflammation important, pour privilégier les soins les plus doux comme les compresses, les pulvérisations ou les bains simples.

TLM : Ces cures sont-elles prises en charge par l’Assurance maladie ?

Dr Laurentiu Gologan : L’Assurance maladie rembourse une cure thermale de trois semaines par an, sous réserve qu’elle ait été prescrite par un médecin et que les stations thermales désignées par ce dernier proposent une orientation en dermatologie. Les curistes suivant deux orientations, comme la dermatologie et les affections de la muqueuse buccale, seront pris en charge par l’Assurance maladie et leurs soins remboursés à hauteur de 65%. Enfin, les soins thermaux qui occupent le curistes pendant une heure et demie à deux heures par jour peuvent être complétés par de l’éducation thérapeutique proposée en ateliers pendant huit heures réparties sur les trois semaines de cures. Les curistes viendront y apprendre ce qui se passe dans leur peau pour mieux comprendre leur maladie, leur traitement et adapter leur mode de vie pour repartir sur de bonnes bases et prolonger sur le reste de l’année les bienfaits de la cure thermale.

TLM : Les cures thermales ont-elles vocation à remplacer les traitements médicaux pour l’eczéma et le psoriasis ?

Dr Laurentiu Gologan : Non, absolument pas ! L’arrêt des traitements locaux et systémiques est d’ailleurs déconseillé pendant la cure thermale. Les soins thermaux relèvent d’une approche complémentaire. Ils sont souvent prescrits lorsque la maladie reste mal contrôlée malgré le traitement medicamenteux, lors d’une pause thérapeutique par exemple ou avant la mise en place d’un traitement systémique ; cela permet de soulager le patient et d’améliorer ses symptômes, sans risque d’effets secondaires supplémentaires.

Propos recueillis

par Charlotte Montaret ■

Les praticiens trouveront un espace dédié médecins sur le site : www.medecinethermale.fr