• Dr KOCHERT : Quand la vaccination standard se rappelle à tous…

Fabienne KOCHERT

Discipline : Infectiologie

Date : 22/06/2020


  • 13_photoParole_119PEFabienneKochert.jpg

La Semaine de la vaccination 2020 devrait se dérouler du 20 au 26 avril prochains. Dans le contexte actuel de la pandémie de Covid-19, la sensibilisation du public et des professionnels de santé sur l’enjeu des vaccins apparaît d’autant plus essentielle. Entretien avec le Dr Fabienne Kochert, pédiatre à Orléans et présidente de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA). 

 

TLM : Les Français, longtemps mauvais élèves, sont-ils aujourd’hui mieux vaccinés ?

Dr Fabienne Kochert : Oui. En pédiatrie ambulatoire, nous constatons que les enfants sont aujourd’hui bien vaccinés. La mise en place du calendrier obligatoire pour la vaccination des nourrissons nous a facilité la tâche. La loi de janvier 2018 rend obligatoire la vaccination contre onze maladies au lieu de trois auparavant (diphtérie, tétanos, polio). Les vaccinations contre Coqueluche, Haemophilus influenzae B, hépatite B, pneumocoque, méningocoque C, rougeole, oreillons, rubéole sont devenus obligatoires alors qu'elles n'étaient auparavant que recommandées. La plupart des parents qui hésitaient avant à faire vacciner leurs enfants le font désormais sans problème. Bien sûr, il reste quelques farouches  opposants à la vaccination, mais ils sont rares. 

 

TLM : Au-delà des vaccins du calendrier obligatoire recommandés, lesquels recommandez-vous ?

Dr Fabienne Kochert : Je conseille le vaccin contre le méningocoque B pour les petits nourrissons parce que la méningite est une maladie grave, le méningocoque B en est le germe le plus souvent responsable dans cette tranche d'âge. Les données récentes prouvent l'efficacité de ce vaccin pour protéger les petits nourrissons. Il est d’ailleurs inclus dans le calendrier vaccinal d’autres pays européens. Autre vaccin utile pour les nourrissons notamment ceux en collectivité : le vaccin contre le rotavirus, par voie orale qui protège contre la plus fréquente des gastroentérites.

Pour les adolescents, une injection vaccinale de rappel contre le méningocoque C est préconisée ou mieux un vaccin protégeant contre les méningocoques A, C, W et Y, germes en augmentation dans la population des adolescents et des jeunes adultes.

Le vaccin contre le papillomavirus (HPV), recommandé et remboursé chez les filles à partir de 11 ans, est désormais recommandé à présent aussi pour les garçons même si le remboursement n'a pas encore été obtenu dans ce cas.

 

TLM : Et pour les adultes ?

Dr Fabienne Kochert : Le calendrier vaccinal a été simplifié avec un rappel pour le Diphtérie Tetanos, Polio et coqueluche à 25 ans, à 45 ans, 65 ans, puis tous les dix ans ensuite. Les adultes sont mieux protégés aujourd’hui grâce à une sensibilisation des professionnels de santé. Pour les jeunes parents ou futurs parents ainsi que pour tout l'entourage des nouveau-nés, une vaccination "cocooning" est préconisée avec un rappel vaccinal DTPCoq (diphtérie tétanos Polio Coqueluche) afin de protéger les petits nourrissons contre la coqueluche en attendant qu'ils ne soient eux-mêmes protégés par leur propre vaccination.

.

En Grande-Bretagne, les femmes enceintes sont vaccinées pendant la grossesse: c’est une stratégie qui a fait ses preuves, car cela permet le passage des anticorps de la mère au fœtus et protège les nouveau-nés contre la coqueluche.

 

TLM : Comment vacciner un adulte mal ou non vacciné ?

Dr Fabienne Kochert : Il existe des protocoles de rattrapage vaccinaux, tout comme pour les enfants non vaccinés. Si une personne de 35 ans n’a pas fait de rappel à 25 ans, on fait une seule injection. S’il manquait aussi le rappel à 11 ans, on fait deux injections. 

 

TLM : Est-il encore temps de se vacciner contre la grippe ce printemps ?

Dr Fabienne Kochert : Non, cela n’a plus d’intérêt, car le virus grippal ne circule presque plus en France.

 

TLM : Quels sont les messages à faire passer dans le contexte actuel ?

Dr Fabienne Kochert : Le message à transmettre est qu'Il faut continuer à vacciner les nourrissons malgré la situation de crise actuelle liée à l'épidémie à coronavirus.

En pédiatrie ambulatoire, nous avons mis en place des consultations dédiées pour pouvoir accueillir les nourrissons en toute sécurité.

Notre crainte est que les parents diffèrent cette vaccination. Or la situation actuelle peut durer et le risque d’infections graves (méningites, coqueluche, rougeole) ne disparaît pendant l'épidémie à Covid 19 !

Le calendrier vaccinal doit être respecté pour que les nourrissons soient correctement protégés.  Il ne faudrait pas qu'à la crise sanitaire actuelle s'ajoute pour les nourrissons une augmentation d'infections graves que les vaccins permettent d'éviter

Les pédiatres pourront éventuellement proposer de regrouper plusieurs injections vaccinales sur une même consultation.

Il est important de souligner que, contrairement à ce que l'on a pu entendre, il n'y a aucun risque à vacciner contre rougeole oreillons et rubéole, en cette période de pandémie à COVID-19. Rappelons que l’épidémie persistante de rougeole provient d’enfants non vaccinés. Les rappels vaccinaux ultérieurs à 6 ans et 11 ans sont un peu moins urgents, il y a une marge de quelques mois. 

 

TLM : Quand peut-on espérer disposer d’un vaccin contre le SRAS-CoV-2 ?

Dr Fabienne Kochert : Les équipes de recherche s’activent énormément, mais selon les dernières informations. Aucun vaccin ne sera disponible pour juguler l’épidémie actuelle.

  • Scoop.it